Ni surveillance, ni consumérisme algorithmique. Vers un modèle européen alternatif pour les villes intelligentes
De nombreux projets de villes intelligentes voient le jour, guidés par des objectifs d’efficacité et d’amélioration des politiques publiques. Tous reposent sur un usage intensif des données et des outils numériques mais les réalisations concrètes prennent des formes variées. Certains modèles s’exportent et deviennent des leviers d’influence, tandis que l’Europe cherche encore sa voie.
Les projets de villes intelligentes ou « smart cities » prennent des formes diverses, allant de l’installation d’éclairages urbains connectés à des initiatives totales telles que The Line – le projet pharaonique et futuriste porté par l’Arabie Saoudite. Sous une forme ou une autre, ces initiatives se multiplient, notamment guidées par des objectifs d’efficacité et d’amélioration des politiques publiques. Elles ont en commun de mobiliser de nombreux outils numériques et de faire usage de la donnée pour élaborer et piloter des services publics. En s’exportant, ces projets deviennent aussi des leviers d’influence internationale. Où se situe l’Europe sur ce spectre ? Si de nombreux projets de territoires intelligents ont déjà été mis en œuvre sur le continent, l’Europe cherche encore son propre modèle.
Deux modèles font l’unanimité contre eux : celui porté par la Chine et celui mis en œuvre par certaines villes nord-américaines. Le premier subordonne la smart city à des impératifs de sécurité et de contrôle social. Il contribue à une surveillance de tous les instants de la population. À l’opposé de ce modèle répondant avant tout à des objectifs de contrôle et de surveillance au nom de l’État, le modèle nord-américain d’inspiration californienne est, lui, décrié pour son usage massif de données personnelles, récoltées et exploitées par des acteurs privés. Les habitants s’alarment d’une utilisation potentielle de ces données à des fins commerciales et déplorent le remplacement des délibérations démocratiques par des outils automatisés.
Partant, élaborer un modèle européen nécessite de prendre en compte ces écueils et de respecter tant les enjeux liés à la protection de la vie privée que le maintien de procédures ouvertes et démocratiques. L’Europe peut s’appuyer sur un cadre réglementaire ambitieux, capable de favoriser le développement de smart cities dans son territoire. Ce cadre peut aussi constituer un véritable atout pour l’exportation de son modèle vers d’autres continents. Les initiatives européennes dans le domaine des smart cities s’inscrivent aussi dans le cadre des efforts en matière de souveraineté numérique. À ce titre, les enjeux de standardisation, d’interopérabilité ainsi que les infrastructures sont au cœur des débats et s’ils doivent être pleinement intégrés dans les projets mis en œuvre, ils sont aussi l’objet de vives concurrences internationales.
Cette étude est également disponible anglais : Neither Surveillance nor Algorithm-driven Consumerism. Toward an Alternative European Model for Smart Cities.
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