Un budget "historique" et moins d'équipements... Le paradoxe de la future loi de programmation militaire
Malgré des crédits en augmentation de 40%, la loi de programmation militaire 2024-2030, qui doit être votée ce 6 juin à l'Assemblée, marque une baisse des commandes de Rafale, de frégates ou de blindés. Analyse d'une contradiction.
"Tout ça pour ça". C'est, en résumé, le sentiment largement partagé dans la communauté de défense sur le projet de loi de programmation militaire (LPM) 2024-2030, dont le vote solennel à l'Assemblée nationale est prévu le 6 juin. Certes, la LPM marque un effort historique de réinvestissement dans les armées françaises.
Elle prévoit d'investir 413 milliards d'euros en sept ans, soit 40% de plus que la précédente. De 32 milliards en 2017 à l'arrivée à l'Elysée d'Emmanuel Macron, le budget de défense devrait passer à 68,9 milliards en 2030, une remontée en puissance inédite. [...] Pourtant, malgré la forte hausse des crédits, la plupart des cibles d'acquisitions d'équipements ont été réduites. L'armée de l'Air aura 48 Rafale et 15 A400M en moins en 2030 par rapport aux prévisions de la précédente LPM. La Marine doit faire une croix sur deux frégates de défense et d'intervention (FDI) à même échéance. Quant à l'armée de Terre, elle aura 500 blindés Griffon et Jaguar en moins en 2030 par rapport aux prévisions antérieures.
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Au ministère des Armées, on assume ce choix. "Cette LPM privilégie la cohérence sur la masse d'équipements, résumait Sébastien Lecornu le 11 mai. Avoir 1.000 chars Leclerc ou canons Caesar dans des entrepôts, sans munitions ou infrastructures, ne servirait pas nos armées." Ce choix d'une armée "échantillonnaire" est-il bien raisonnable, alors que la guerre fait rage en Ukraine? "Bien sûr, on aurait pu rêver d'une LPM avec 70 milliards d'euros de plus, qui aurait permis de massifier les armées, pointe le général Charles Beaudouin, ancien sous-chef d'état-major plans et programmes de l'armée de terre. Mais cette LPM est une bonne loi, cohérente, qui traite des sujets qui avaient été sacrifiés depuis trente ans, comme les munitions et le soutien."
Un format hérité de l'après-guerre froide
D'autres experts sont moins convaincus, soulignant que la France réduit ses acquisitions au moment même où la Pologne a commandé, en un an, 366 chars Abrams et 32 chasseurs F-35 aux Etats-Unis, et 1.000 chars K2, 50 avions de combat FA-50 et 288 lance-roquettes multiples à la Corée du Sud.
"Le projet de LPM pérennise essentiellement un format hérité de l'après-guerre froide visant à conserver des capacités sur tout le spectre, au prix d'un échantillonnage des moyens conventionnels qui n'est soutenable qu'en temps de paix", estime Elie Tenenbaum, directeur du Centre des études de sécurité de l'Ifri dans une note parue le 26 mai.
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