Microsoft, Google, Meta, Amazon… Que cache l’intérêt des géants du numérique pour le nucléaire ?
L’année 2024 a vu les Gafam, l’acronyme qui désigne les géants de la tech, se rapprocher d’acteurs de l’industrie nucléaire. Toujours plus gourmands en énergie, ils y voient un moyen de décarboner leurs activités à long terme, mais actent leur renoncement sur le court terme. Décryptage.
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C’est Microsoft qui a ouvert la marche en septembre. La multinationale américaine, qui investit déjà dans le développement de la fusion nucléaire, s’est rapprochée de l’électricien Helion Energy. Objectif affiché : remettre en service le réacteur numéro 1 de la centrale de Three Mile Island, à l’arrêt depuis 2019, en Pennsylvanie. L’entreprise fondée par Bill Gates et Paul Allen espère ainsi pouvoir compter, dès 2028, sur une production de 837 mégawatts.
Dans la foulée, les annonces se sont enchaînées au quatrième trimestre. Google s’associe à Kairos Power pour produire 500 mégawatts à horizon 2035, avec des petits réacteurs modulaires (PRM). Amazon soutient la start-up X-Energy, pour disposer également de sa flotte d’ici 2039, avec une ambition de 5 gigawatts. De son côté, Meta (Facebook, Instagram, WhatsApp…) a lancé un appel aux acteurs américains pour exploiter entre 1 et 4 gigawatts d’électricité grâce à l’atome dès 2030.
Le soutien aux énergies renouvelables
Jusqu’à présent, la stratégie énergétique de ces Gafam reposait sur les énergies renouvelables. « Ils sont leurs principaux soutiens aux États-Unis et ailleurs », pose Marc-Antoine Eyl-Mazzega, directeur du centre énergie et climat à l’Institut français des relations internationales (Ifri). De quoi se revendiquer bas carbone. Cependant, cet affichage flatteur est aussi trompeur.
« Jusqu’à présent, ils ont acheté une production bas carbone, mais il n’y avait aucune obligation de temporalité, ni même d’être sur le même réseau », souligne Valérie Faudon, déléguée générale de la Société française d’énergie nucléaire (SFEN). Pour le dire autrement, les sociétés pouvaient consommer localement des énergies fossiles, à condition de financer la production de renouvelables sur le marché mondial. Dans un article publié en septembre, The Guardian estimait que les émissions de gaz à effet de serre des centres de données (data centers) des géants de la tech étaient en réalité plus de sept fois supérieures aux chiffres annoncés.
Quel impact sur le climat ?
Pour accompagner cette courbe exponentielle, « les ENR ne vont pas assez vite », constate Marc-Antoine Eyl-Mazzega. D’où l’intérêt pour le nucléaire, mais aussi pour la géothermie ou le stockage.
Les petits réacteurs modulaires présentent en particulier l’avantage de pouvoir être installés au plus près des centres de données, alors que « les réseaux américains sont assez mal interconnectés », précise Valérie Faudon.
Ces solutions bas carbone ont toutefois un hic. Le calendrier de déploiement ne coïncide pas avec la croissance des besoins.
« Les PRM, ce n’est pas pour dans cinq ans. Les Gafam préparent l’avenir et ils sont riches. Ils se disent, “on va financer ces technologies et, avec nos solutions digitales, on va aider à la mise en œuvre”. Ils sont prêts à prendre des risques, mais, dans l’immédiat, ils vont renier leurs engagements environnementaux et alimenter leurs besoins avec des centrales à gaz », pointe le directeur du centre énergie et climat de l’Ifri.
Un triplement de la consommation annoncé
Au-delà de cet enjeu de responsabilité sociétale des entreprises, il y a surtout la voracité des Gafam en matière d’énergie.
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Vers des conflits d’usage ?
Aux États-Unis, où se concentrent plus de 2 000 data centers, une prise de conscience s’est opérée, nourrie récemment par les conclusions de Bekeley Lab, qui vont aussi dans le sens d’un emballement des consommations. Des États commencent à craindre d’être confrontés à des problèmes d’approvisionnement, si les plateformes vampirisent l’énergie.
« Elles ont les moyens d’acheter de l’électricité, quel que soit le prix, pourvu qu’elle soit abondante et bas carbone. Le sujet n’est plus de sécuriser leur alimentation, mais carrément de devenir des acteurs du système énergétique », prévient Marc-Antoine Eyl-Mazzega.
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> Lire l'article dans son intégralité sur le site de Ouest-France
Média
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