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Les nouveaux diamants de sang

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Extraits en zone en guerre, l'extraction des "diamants de sang" finance les conflits régionaux. Alors que la Russie détient de nombreuses mines illégales autour du globe, la guerre en Ukraine donne une nouvelle dimension à cette géopolitique des pierres.

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Shutterstock/NMK-Studio
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Avec :

  • Thierry Vircoulon Chercheur associé à l’Observatoire de l’Afrique centrale et orientale à l’IFRI

  • Elise Rousseau politiste, chercheuse à l’Université de Cambridge

Une image publicitaire d’une jeune femme arborant un imposant collier en diamant, en miroir, la photographie d’un corps blessé dans sa chair et l’inscription “Quels prix pour ces diamants ?” : cette campagne choc de l’ONG Amnesty internationale a marqué les esprits à la fin des années 1990.

À cette époque, plusieurs ONG tentent de sensibiliser l’opinion internationale sur les conséquences de l’achat de diamants : l’industrie diamantaire alimente la violence de groupes rebelles en Angola et en Sierra Leone. L’image de pureté des diamants, construite avec minutie et patience tout au long du 20e siècle par le groupe de Beers (qui détient le monopole sur le secteur), est mise en danger, Elise Rousseau nous rappelle que "De Beers est une société qui a vu le jour en Afrique du Sud, à la suite de la découverte à la fin du 19e siècle, de diamants. Elle exerce tout au long du 20e siècle un monopole important sur la vente de diamant brut. Elle parvient dans l'après-guerre à créer une demande importante grâce à des campagnes de publicités (notamment la phrase culte “un diamant, c'est pour l’éternité”) et de placements de produits au cinéma. Le diamant est une industrie de luxe, pour laquelle l’image est donc particulièrement importante, la notion de pureté est cruciale. C’est pour cette raison que de Beers va essayer par tous les moyens de ne pas laisser sa réputation être entachée par les campagnes de sensibilisation sur les diamants de sang et va être un acteur de la mise en place du processus de Kimberley". En effet, en 2000 une première conférence sur la régulation du marché du diamant se tient en Afrique du Sud. Le processus de Kimberley est lancé. Il établit en 2003 une définition précise des diamants de conflits, il s’agit officiellement “des diamants bruts utilisés par les mouvements rebelles ou leurs alliés pour financer des conflits visant à déstabiliser des gouvernements légitimes”. Un mécanisme de certification est mis en place pour garantir l’origine des diamants vendus dans le monde entier.

Cependant, les mécanismes de régulations sont vite contournés : les réseaux de contrebandes se réorganisent, Dubaï devient un lieu privilégié pour le blanchiment des diamants du sang.

Thierry Vircoulon nous explique que "les processus de contournements sont particulièrement bien rodés, au point que la régulation mise en place ne sert plus à rien. Il existe d'une part des faux certificats, et des vrais-faux certificats obtenus par la corruption auprès d'agences gouvernementales directement dans les pays producteurs. Aujourd'hui, la plaque tournante des diamants de sang, c'est Dubaï, c’est le stade mafieux du capitalisme : en plus de l’évasion fiscale, la législation laxiste de la ville permet le blanchiment de nombreuses marchandises illicites. Il est ainsi particulièrement facile d’obtenir de faux certificats à Dubaï".


Par ailleurs, la définition retenue de diamants de conflits apparaît rapidement limitée : comme les violences ne sont pas commises par “des groupes rebelles”, elle empêche tout embargo envers les diamants en provenance du Zimbabwe, alors même qu’ils servent à financer un gouvernement autoritaire, qui viole dans la violence les droits élémentaires de sa population. Aujourd’hui, seuls les diamants en provenance de Centrafrique peuvent être qualifiés de “diamants de conflit". Le processus de Kimberley semble paralysé, incapable de se réformer. Certaines ONG décident de le quitter tandis que les entreprises diamantaires définissent elles-mêmes des critères de transparence exigeants pour répondre aux demandes de leur clientèle.

> Ecouter le podcast sur France Culture

 

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Thierry VIRCOULON

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Chercheur associé, Centre Afrique subsaharienne de l'Ifri

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