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Le spécialiste du terrorisme Marc Hecker : "L'Etat islamique va devenir un défi pour les talibans"

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interrogé par

  Antoine Malo
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Bien qu'affaibli et visé par une frappe américaine samedi, le groupe terroriste Etat islamique (ou Daech) pourrait tirer profit du chaos actuel en Afghanistan.

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Spécialiste du terrorisme et coauteur avec Elie Tenenbaum de La Guerre de vingt ans (Robert Laffont, 2021), Marc Hecker, directeur de recherche à l'Institut français des relations internationales (Ifri), décrypte pour le JDD les ambitions de l'État islamique au Khorasan, la branche afghane de l'organisation djihadiste, responsable de l'attaque suicide de jeudi à Kaboul qui a fait au moins 85 morts. Les États-Unis ont mené samedi une frappe de drone contre une cible du groupe État islamique en Afghanistan, au moment où le pont aérien à l'aéroport de Kaboul entre dans sa phase finale sous une tension extrême, avec le risque persistant de nouveaux attentats.

Quel message l'État islamique a-t-il voulu faire passer en perpétrant cet attentat-suicide ?

Daech a voulu montrer qu’il était un acteur sur lequel il fallait compter dans cet Afghanistan contrôlé par les talibans. Si le groupe a commis moins d’attaques ces derniers mois, il est encore capable de frapper ses cibles de prédilection : les étrangers, les talibans et les civils afghans ayant travaillé avec l’ancien gouvernement ou les Occidentaux. Tous sont vus comme des infidèles ou des apostats.

De combien d’hommes dispose le groupe ?

Un récent rapport de l’ONU évoque entre 1500 et 2 200 combattants avec deux provinces mises en avant, Nangarhar et Kounar, dans l’est du pays. Ce sont des chiffres à considérer avec précaution. On sait en tout cas que Daech n’a pas réussi à contrôler de vastes territoires. Ce n’est pas faute d’avoir essayé : la volonté de Daech, quand la province du Khorasan a été créée en 2015, était de dupliquer le modèle syroirakien. Mais cela a échoué.

Pourquoi?

Parce que le groupe s’est heurté à une double opposition : celle du gouvernement afghan soutenu par les Américains, qui ne voulaient pas voir émerger, après Al-Qaida, un deuxième groupe prônant le djihad global. Il fallait donc tuer la menace dans l’oeuf. Et celle des talibans, qui ont vu en Daech un concurrent potentiel.

Mais certains combattants de Daech ne sont-ils pas d’anciens talibans ?

Au départ, il y a eu des défections des talibans au profit de Daech, d’autant que l’Etat islamique disposait de moyens financiers importants lui permettant de payer ses combattants. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles les talibans ont réagi vigoureusement. Certaines sources laissent entendre que l’émir actuel de l’Etat islamique au Khorasan, Shahab Al-Muhajir, serait un ancien cadre intermédiaire du réseau Haqqani, lié aux talibans.

D’où venait cet argent ?

Selon le chercheur Antonio Giustozzi, des combattants sont par tis de la zone afghano-pakistanaise vers le Levant en 2012-2013 pour faire le djihad contre le régime d’Assad. Certains de ces combattants ont rejoint Daech et ont fini par rentrer en Afghanistan. Al-Baghdadi a soutenu cette dynamique - y compris financièrement. Le groupe aurait aussi bénéficié de dons privés venant du golfe Arabo-Persique. D’après Giustozzi, Daech disposait ainsi de dizaines de millions de dollars à son apogée. Mais, depuis l’effondrement du califat syro-irakien, la province du Khorasan est en perte de vitesse.

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Lire l'interview intégrale sur le site du JDD

 

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Marc HECKER

Marc HECKER

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Directeur adjoint de l'Ifri, rédacteur en chef de Politique étrangère et chercheur au Centre des études de sécurité de l'Ifri