La crise politique en Allemagne expliquée
La coalition tripartite au pouvoir depuis 2021 en Allemagne s’est effondrée le 6 novembre dernier après le limogeage du ministre des Finances, Christian Lindner, et la décision de son parti de quitter le gouvernement.
Cette crise, que l’on voyait venir depuis un moment, a été précipitée par des désaccords sur le budget fédéral. Le chancelier Olaf Scholz, chef du parti social-démocrate (SPD), va donc déclencher des élections, qui auront lieu le 23 février prochain. Quelles sont les clés de ce scrutin ?
1. L’impopularité du chancelier
Olaf Scholz est très impopulaire. Âgé de 66 ans, il a pris les rênes du pays après Angela Merkel et souffre de la comparaison avec celle qui a longtemps incarné la stabilité.
« À l'époque d'Angela Merkel, l'Allemagne était une puissance économique reconnue, qui avait sa place dans la cour des grands », note Paul Maurice, secrétaire général du Comité d'études des relations franco-allemandes à l’Institut français des relations internationales (IFRI). « Elle était écoutée à l'échelle européenne et même mondiale. »
Ce n’est pas le cas d’Olaf Scholz, plutôt terne et effacé.
Texte citation
« On reproche à Scholz de ne pas avoir été assez efficace dans la mise en œuvre d'une politique qui aurait défendu le modèle allemand à la fois en termes économiques, mais également en ce qui concerne sa place en Europe et dans le monde. »
Secrétaire général du Comité d'études des relations franco-allemandes (Cerfa) à l'Ifri
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C’est carrément le modèle économique allemand qui ne tient plus la route parce que ses piliers se sont effondrés, explique Paul Maurice. Le premier pilier était l’accès à une énergie bon marché, le gaz russe, que le pays a perdu avec l’invasion de l’Ukraine. S’y est greffé le ralentissement des exportations vers la Chine, principal partenaire commercial de l’Allemagne.
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Aux élections fédérales, l’AfD recueille 19 % des intentions de vote, soit près du double des 10,4 % des voix qu’elle a recueillis en 2021. Même avec un tel score, il n’y a aucune chance de voir l'AfD entrer au gouvernement, estime Paul Maurice. Le « mur coupe-feu » ne tombera pas et aucun parti n’acceptera de faire une alliance avec l'AfD, croit-il.
En 2020, une tentative de rapprochement entre une partie de la CDU et l’AfD, en Thuringe, avait causé une crise majeure et coûté son poste à la dauphine présumée d'Angela Merkel, Annegret Kramp-Karrenbauer. Le tabou n’est pas près d’être rompu. « Si un parti cède [et envisage une coalition avec l’AfD], il va perdre ses électeurs », affirme M. Maurice.
Texte citation
« À la différence de l’extrême droite française, l'extrême droite allemande n’a pas fait son tournant de dédiabolisation. Elle est extrêmement dure dans ses positions, presque néonazie dans certains cas. »
Secrétaire général du Comité d'études des relations franco-allemandes (Cerfa) à l'Ifri
« Le risque, c'est que l'Allemagne réagisse de manière individuelle et qu’on se retrouve avec une politique qui ne défend que les intérêts allemands, alors qu'on a besoin aujourd'hui d’une réaction européenne face à l'élection de Donald Trump, dans le domaine de la sécurité notamment, et sur la question de la compétitivité internationale », estime également Paul Maurice.
Si certains se frottent les mains en voyant l’UE affaiblie, d’autres, comme l’Ukraine, s’inquiètent pour leur avenir.
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