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Entre Daech et le Hamas, « les différences sont majeures »

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interviewée par Fabien Escalona dans

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La chercheuse Héloïse Fayet revient sur la proposition d’Emmanuel Macron de bâtir une coalition internationale contre le Hamas, à l’instar de celle qui combat les djihadistes de l’organisation État islamique.
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Rassemblement en soutien à la Palestine
Rassemblement en soutien à la Palestine
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Chercheuse au Centre des études de sécurité, au sein du think tank de l’Institut français des relations internationales (Ifri), Héloïse Fayet a publié l’an dernier une étude sur la « posture stratégique » de la France au Moyen-Orient, dans laquelle elle appelait à dépasser une « focale contre-terroriste ». Dans cet entretien, elle souligne que la mise en équivalence de tous les groupes dits « terroristes » de la région n’a pas de véritable pertinence stratégique.

La proposition de « coalition » d’Emmanuel Macron suggère une mise en équivalence de l’État islamique (Daech) et du Hamas, qui partageraient une idéologie islamiste et des moyens d’actions terroristes. Mais peut-on vraiment traiter ces deux organisations de la même manière ?

 

Tout d’abord, il faut préciser que cet amalgame n’a jamais été suggéré par des chercheuses ou des chercheurs travaillant sur ces deux entités. Il est le fruit d’une campagne de communication menée par les dirigeants d’Israël et leurs relais en France. Cette campagne a pu s’appuyer sur le fait que les actions commises par le Hamas, le 7 octobre dernier, ont rappelé les pires exactions de Daech. Pour le reste, les différences sont majeures.
 
Le Hamas est un groupe politique doté d’une branche armée, dont le champ d’action est circonscrit dans une zone géographique précise, à savoir les territoires palestiniens, qu’il affirme défendre contre l’État israélien. Il n’entend pas se projeter à l’étranger : le temps où des actes terroristes de groupes palestiniens étaient commis en Europe est révolu.

 

"Une extension du mandat de la coalition [contre Daech] paraît extrêmement improbable."

 
Par contraste, Daech a tenté de bâtir un califat autoproclamé qui n’était reconnu par personne, et possédait des contours d’autant plus flous que l’objectif ultime était de rassembler tous les musulmans. Ses ennemis étaient et restent beaucoup plus nombreux, tandis que ses revendications ne s’inscrivent dans aucun « fait national ». De plus, les attaques terroristes de ce groupe ont récemment frappé l’Europe à plusieurs reprises.
 
Dans la même conférence de presse à Jérusalem, Emmanuel Macron a d’ailleurs aussi parlé d’Al-Qaïda. Il s’agit certes d’une organisation terroriste islamiste, mais plutôt en rivalité avec Daech. Rassembler des acteurs aussi différents sous une même bannière, surtout avec le Hamas, me semble assez confus.
 
De quoi parle-t-on quand on évoque la coalition contre Daech ? Quelles formes prend-elle concrètement ?
 

Il y a en fait deux coalitions. L’une est très large et politique. Dénommée en anglais The Global Coalition against Daesh, elle rassemble 86 partenaires, parmi lesquels l’Union européenne et l’Alliance atlantique, ainsi que des pays comme le Qatar et l’Arabie saoudite. Son objectif est de s’attaquer aux financements de Daech, et de soutenir la reconstruction des territoires libérés de sa domination.

L’autre est plus restreinte et militaire. Dénommée en anglais Combined Joint Task Force – Operation Inherent Resolve, elle rassemble une vingtaine de pays engagés dans un combat armé contre cette organisation, et dans le soutien aux forces irakiennes qui lui font face. L’opération Chammal en est la déclinaison française.

Le problème, c’est qu’on ne sait pas trop de quelle coalition a parlé Emmanuel Macron, et les explications ultérieures de l’Élysée n’ont pas véritablement permis d’éclaircir ce point.

L’Élysée s’est en effet sentie obligée de préciser les propos du président de la République. Finalement, il s’agirait de « s’inspirer » de la coalition contre Daech. Mais cela rend-il le projet plus compréhensible ou pertinent ?

L’idée de base consiste à tirer les leçons de la lutte contre Daech, pour les appliquer contre d’autres groupes terroristes. L’Élysée a écarté la piste d’une extension du mandat de la coalition existante, tant elle paraît extrêmement improbable. Le mandat actuel dépend en effet de plusieurs résolutions des Nations unies, et l’on n’imagine pas qu’en étant réorienté contre le Hamas, il puisse recueillir les mêmes soutiens (comme celui du Qatar), sans parler des blocages actuels du Conseil de sécurité.

Dans la même prise de parole d’Emmanuel Macron, on trouvait d’ailleurs déjà l’idée de « bâtir une coalition », qu’on suppose donc nouvelle. En rencontrant Mahmoud Abbas [le dirigeant de l’Autorité palestinienne, en rivalité avec le Hamas – ndlr], il a même parlé d’une simple « coopération », qui ne suppose pas la même exigence en termes de légalité internationale.

Mais dans tous les cas, cela pose le problème de l’aide concrète que d’autres pays pourraient apporter à Israël, qui est pourtant habitué à faire face au Hamas depuis trente ans. Et encore une fois, les groupes dont on parle sont en réalité très différents.

L’Élysée s’est en effet sentie obligée de préciser les propos du président de la République. Finalement, il s’agirait de « s’inspirer » de la coalition contre Daech. Mais cela rend-il le projet plus compréhensible ou pertinent ?
 

L’idée de base consiste à tirer les leçons de la lutte contre Daech, pour les appliquer contre d’autres groupes terroristes. L’Élysée a écarté la piste d’une extension du mandat de la coalition existante, tant elle paraît extrêmement improbable. Le mandat actuel dépend en effet de plusieurs résolutions des Nations unies, et l’on n’imagine pas qu’en étant réorienté contre le Hamas, il puisse recueillir les mêmes soutiens (comme celui du Qatar), sans parler des blocages actuels du Conseil de sécurité.

Dans la même prise de parole d’Emmanuel Macron, on trouvait d’ailleurs déjà l’idée de « bâtir une coalition », qu’on suppose donc nouvelle. En rencontrant Mahmoud Abbas [le dirigeant de l’Autorité palestinienne, en rivalité avec le Hamas – ndlr], il a même parlé d’une simple « coopération », qui ne suppose pas la même exigence en termes de légalité internationale.

Mais dans tous les cas, cela pose le problème de l’aide concrète que d’autres pays pourraient apporter à Israël, qui est pourtant habitué à faire face au Hamas depuis trente ans. Et encore une fois, les groupes dont on parle sont en réalité très différents.

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Héloïse FAYET

Héloïse FAYET

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Chercheuse, responsable du programme dissuasion et prolifération, Centre des études de sécurité de l'Ifri

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