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Pour une révision de la politique européenne de l'énergie

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Édito Énergie
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Pour une révision de la politique européenne de l'énergie
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La politique européenne de l’énergie est actuellement construite sur un ensemble de dispositions contradictoires et de concepts discutables.

Corps analyses

Prendre conscience de cette situation est indispensable pour la réorienter à l’occasion de la mise en place d’une nouvelle Commission.

Comme il est bien connu, cette politique repose sur :
- un texte de base, le traité de Lisbonne,
- trois axes d’action :
- réduire les émissions européennes de gaz à effet de serre,
- créer un marché européen de l’énergie,
- assurer la sécurité de l’approvisionnement de l’Europe en énergie.
- trois objectifs pour 2020 :
- baisser les émissions de gaz à effet de serre de 20 % par rapport à 1990,
- atteindre 20 % en 2020 d’énergies renouvelables dans la consommation d’énergie finale,
- baisser de 20 % en 2020 la consommation d’énergie finale par accroissement de l’efficacité énergétique.

CONTRADICTIONS ET INSUFFISANCES

De manière un peu scolaire, on peut en énumérer sept de natures très différentes.

1. Il faut reconnaître tout d’abord qu’il y a un clivage dans les attitudes des Européens dans ce domaine :

Pour une partie d’entre eux, variable d’un pays à l’autre, la priorité absolue est de protéger la Terre, (et l’ensemble du monde vivant). En conséquence, il faut réduire le plus rapidement possible les émissions de gaz à effet de serre, les consommations de ressources non renouvelables et l’usage de technologies intrinsèquement dangereuses comme le nucléaire.

Pour le reste de l’opinion, il faut protéger le climat, gérer rationnellement les ressources, et veiller à l’emploi sûr des technologies.

Les divergences sont profondes entre ces deux approches.

2. Le Traité de Lisbonne est incohérent puisqu’il veut établir un marché tout en laissant aux Etats-membres toute liberté en matière de choix de leur energy-mix. La décision allemande d’abandonner le nucléaire l’a bien montré.

3. La politique de lutte contre le changement climatique inclut une contradiction :
- d’une part, l’Union Européenne veut être exemplaire dans les négociations internationales en oubliant que, pour rester compétitive économiquement, elle doit s’imposer des contraintes tenant compte de sa taille et des efforts des autres grandes régions,
- d’autre part, le choix du système des quotas aurait dû être associé à des contraintes moins laxistes et à une adaptation rapide de ces contraintes à la conjoncture économique, mais son fonctionnement à engendré un prix du CO2 émis quasiment nul.

4. L"UE recourt implicitement à une conception simpliste de la rareté des ressources naturelles. Certes, le volume à l’intérieur du globe terrestre est fini, mais on ne se heurte pas à un mur proche : lorsque la demande d’une matière première augmente (ou l’offre baisse), le prix s’accroît et conduit à des substitutions entre matières premières, à des recherches sur les usages, à une mise en exploitation de mines plus pauvres ou plus difficiles d’accès. C’est ce qui s’est passé récemment pour le pétrole et le gaz.

Vouloir à un horizon long baisser autoritairement la consommation d’énergie peut ne pas correspondre aux nécessités futures s’il apparaît par exemple qu’il faut utiliser une énergie (chère) à dessaler l’eau de mer ou transporter de l’eau ou à rendre productifs des terrains agricoles peu fertiles.

5. Il n’est jamais souligné qu’il faut investir dans l’efficacité énergétique si le coût de l’investissement est inférieur à la somme de la valeur de l’énergie économisée et des baisses d’émission de gaz à effet de serre.

6. Le désordre règne quant au développement des renouvelables au sein de la plupart des pays et entre les pays. On peut aussi s’interroger sur les investissements de l’éolien en mer compte tenu du coût estimé de cette source d’énergie.

7. D’une manière générale, la Commission néglige les coûts et oublie que la réduction du coût des évolutions énergétiques est un élément essentiel pour la croissance et la compétitivité européenne.

QUELQUES SUGGESTIONS

1. Il faut profiter du changement de Commission dans le deuxième semestre 2014 pour préparer une réelle inflexion de la politique européenne de l’énergie. Si la politique actuelle, à des variantes près, devait perdurer, les conséquences pourraient devenir très défavorables

2. La priorité doit être la réduction des émissions de gaz à effets de serre, sans que l’Europe s’impose des contraintes indépendamment des efforts du reste du monde.

3. Pour le développement des renouvelables intermittents, il faut veiller à ce que le coût de développement soit pris en compte : ce coût est la somme des coûts d’investissement, des coûts d’exploitation et des coûts d’adaptation du système électrique à leur irrégularité.
Il faut contrôler les échanges électriques internationaux, lorsque le prix de l’électricité est quasi nul ou même négatif pour éviter les effets dommageables comme la fermeture des centrales au gaz qui peuvent redevenir indispensables.

4. La politique à l’égard du nucléaire doit être neutre, les options des pays membres étant très différentes à cet égard

5. Ne devrait-on pas instaurer au sein de l’Union des " peer reviews " des politiques énergétiques des Etats-membres.

6. Le Traité de Lisbonne n’interdirait pas la présentation par les différents Etats-membres de leurs plans d’investissement de production d’énergie, les Etats ayant alors la possibilité de coordonner leurs plans.

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Jacques LESOURNE

Intitulé du poste

Ancien Président du Comité scientifique du Centre Énergie

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Énergie et Climat
Centre énergie et climat
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Le Centre énergie et climat de l’Ifri mène des activités et recherches sur les enjeux géopolitiques et géoéconomiques des transitions énergétiques. Il travaille à la fois sur les enjeux de sécurité énergétique, de compétitivité, de maîtrise des chaînes de valeur, et d'acceptabilité. Spécialisé dans l’étude des politiques européennes de l’énergie et du climat, et des marchés de l’énergie en Europe et dans le monde, ses travaux portent aussi sur les stratégies énergétiques et climatiques des grandes puissances comme les Etats-Unis, la Chine ou l’Inde. Il offre une expertise reconnue, enrichie de collaborations internationales et d'événements à Paris et à Bruxelles, notamment.

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