Quels sont les ressorts de la stabilité du pouvoir russe ?
Avec plus du 87 % des voix, Vladimir Poutine a été réélu pour un cinquième mandat ce week-end. Une élection gagnée d'avance qui souligne la capacité du régime à se maintenir dans le temps. Qu'est-ce qui caractérise l'appareil politique russe ? Comment comprendre sa stabilité ?
Arrivé au pouvoir en 2000, Vladimir Poutine a été réélu hier Président avec plus de 87 % des voix. Une longévité dont on peut se demander par quels moyens elle a été obtenue. Certaines approches prônent pour une culture politique autoritaire, réfractaire aux processus démocratiques tels qu’ils se sont répandus en Occident. D’autres pour une verticale de la peur. Certains analystes économiques expliquent que la croissance des revenus moyens en Russie a aidé à une adhésion au projet poutinien et à sa légitimation à la tête de l’État.
Les protestations, visiblement limitées, à cette réélection cachent-elles une adhésion moins forte qu’affichée au pouvoir en place ? Ou bien le pouvoir est-il encore en mesure de faire taire toutes les oppositions ?
Invités :
Tatiana Kastouéva-Jean - Directrice du Centre Russie/Eurasie de l'Ifri
Jean Robert Raviot - Professeur en études russes à l'université Paris-Nanterre
Alain Blum - Chercheur à l'INED et à l'EHESS, membre de l'association Mémorial France
La personnalisation de l’appareil politique russe
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Pour Tatiana Kastouéva-Jean, cette personnalisation du pouvoir est aussi « L'une des fragilités de cet État poutinien » car « Tout tient, tout tourne autour de Vladimir Poutine, jusqu'aux gouverneurs dans les régions qui, avant tout, vont penser à répondre à la demande, aux attentes verticales du pouvoir, plutôt que de répondre aux besoins de la population sur place. Par exemple, lors d’incendies dans une région on constate que le gouverneur va d’abord penser comment il va présenter cela devant le Kremlin au lieu de penser à sauver les vies humaines.
On a vu aussi cette fragilité des institutions, qui sont selon moi très faibles, lors de la mutinerie Prigogine l'année dernière. Ce moment-là a été important parce que Vladimir Poutine avait l'air hésitant et n'a pas réagi tout de suite, et tout le système était quasiment à l'état d'arrêt sans savoir quelle réaction avoir, comment réagir, comment rebondir ».
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Pour aller plus loin :
Tatiana Kastouéva-Jean est l'autrice de La Russie de Poutine en 100 questions, (Édition Tallandier, 2020)
Alain Blum est co-auteur de l'ouvrage Déportés pour l'éternité. Survivre à l'exil stalinien, (Éditions de l'EHESS, à paraitre en avril 2024)
Jean-Robert Raviot est l'auteur de Le logiciel impérial russe (Éditions l'Artilleur, 2024)
> Réécouter l'émission dans son intégralité sur le site de France Culture (5 : 35)
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