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Quand l’Allemagne s’inspire du Canada pour « moderniser » son système d’immigration

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interviewée par Rania Massoud sur

  Radio-Canada
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Avec plus de deux millions d’emplois à pourvoir et une population de plus en plus vieillissante, l’Allemagne met les bouchées doubles pour attirer des centaines de milliers de travailleurs qualifiés du monde entier. Une petite révolution, inspirée directement du Canada, s’opère dans le système d’immigration de la première économie européenne.

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Berlin en parle comme étant la loi sur l’immigration « la plus moderne d’Europe ». Alors que la question migratoire est hautement politisée et polarisante dans le reste du Vieux Continent, l’Allemagne y voit un moyen de survie économique.

Le 23 juin dernier, les députés allemands ont adopté une réforme de la loi sur l’immigration pour instaurer un système de points directement inspiré du modèle canadien, avec comme but affiché de simplifier et d'accélérer l’arrivée de travailleurs qualifiés issus de pays non européens.

Comme la plupart des pays occidentaux, l’Allemagne connaît une grave pénurie de main-d'œuvre, jumelée au vieillissement de sa population. Un phénomène qui risque de devenir un véritable frein à la croissance économique, a récemment déclaré le ministre allemand du Travail, Hubertus Heil.

Selon les derniers chiffres, il y a près de deux millions de postes vacants dans le pays. De plus, la génération des baby-boomers part en grand nombre à la retraite, creusant encore plus l’écart démographique sur le marché du travail.

Si rien n’est fait, le marché du travail devrait perdre sept millions de personnes d’ici 2035, selon une étude de l’Institut de recherche sur le marché du travail (IAB).

  • L’agence pour l’emploi estime à 400 000 le nombre de travailleurs qualifiés étrangers nécessaires chaque année pour permettre à l’Allemagne de maintenir son niveau actuel de prospérité et de richesse, souligne à Radio-Canada Jeanette Süẞ, chercheuse au Comité d'études des relations franco-allemandes (CERFA) à l’Institut français des relations internationales (IFRI).

Selon la conseillère économique du gouvernement allemand, Monika Schnitzer, Berlin a besoin de 1,5 million d'immigrants par an si elle veut avoir 400 000 nouveaux citoyens chaque année et maintenir ainsi le nombre de travailleurs nécessaire pour son économie.

 

Plusieurs mesures inspirées du Canada

Dans sa réforme, le gouvernement allemand a ainsi introduit de nouveaux dispositifs pour réduire les obstacles devant l’arrivée de travailleurs qualifiés issus de pays non européens. On y retrouve trois similitudes avec le modèle canadien, selon Mme Süẞ.

  • « Il y a d’abord l’établissement d’un nouveau système à points qui constitue la plus grande nouveauté de la loi », explique la chercheuse. Pour être admis sur le marché du travail allemand, un candidat à l’immigration doit obtenir un score de 6 points sur les 12 critères portant notamment sur la connaissance de la langue, l’expérience professionnelle, les compétences et l’âge.

Il s’agit d’un questionnaire moins élaboré que celui qui existe au Canada − officiellement appelé Système de classement global (SCG) –, où les candidats à l’immigration peuvent accumuler jusqu’à 1200 points.

 

« Sur le plan de l’attractivité, l’Allemagne a bien sûr plusieurs atouts, mais en raison de la barrière linguistique, je pense que [le gouvernement] n’a pas voulu rendre le système trop compliqué, d’où la simplicité des 6 points sur 12. Ça reste quand même simple en comparaison avec le système canadien », explique Jeanette Süẞ, chercheuse à l’Institut français des relations internationales.

 

« Un vrai changement de paradigme »

L’autre « innovation importante », toujours selon la chercheuse, est « l’abrogation de l’obligation de reconnaissance des diplômes étrangers ».

  • Les profils des travailleurs recherchés par l’Allemagne ne sont pas nécessairement ceux qui détiennent le plus de qualifications académiques, mais plutôt ceux qui ont des connaissances techniques pointues dans le domaine de la construction ou de l’ingénierie, par exemple, explique Jeanette Süẞ.

« On s’est rendu compte, avec le temps, qu’on ne peut pas exiger des ressortissants de pays tiers d’avoir des diplômes reconnus selon les standards allemands »,  selon  Jeanette Süẞ, chercheuse à l’Institut français des relations internationales

« Pour un pays fortement ancré dans un système basé sur la formation professionnelle, qui est unique en son genre, cette abrogation constitue [...] un vrai changement de paradigme ».

De plus, avec le nouveau système à points, « les travailleurs non européens auront la possibilité de venir en Allemagne sans un contrat de travail [...] et ça c’est quand même directement inspiré par le Canada ». Les candidats admis pourront ainsi chercher un emploi une fois arrivés sur le sol allemand.

 

Des réfugiés comme travailleurs qualifiés

La troisième nouveauté est la possibilité pour les réfugiés présents en Allemagne d’obtenir un permis de travail dans le pays. Selon Mme Süẞ, « il s’agit clairement d’une concession de la part du gouvernement tripartite au profit des verts [parti de gauche] [...] qui ont réussi à imposer cette clause ».

Le Canada a lancé en 2018 le « Projet pilote sur la voie d’accès à la mobilité économique » permettant d’accueillir des réfugiés qualifiés sur le marché du travail. En décembre 2021, le ministère de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté s’était engagé à accueillir 2000 réfugiés qualifiés pour combler des pénuries de main-d’œuvre dans des secteurs à forte demande comme ceux des soins de santé et de la construction.

Enfin, un autre projet de loi, qui est toujours en préparation en Allemagne, permet aux travailleurs étrangers d’avoir la nationalité allemande au bout de cinq ans ou trois ans, au lieu de huit actuellement.

D’autres pays européens semblent aussi intéressés par le modèle canadien, notamment la France, l’Espagne, le Royaume-Uni, ainsi que l’Australie. Ces deux derniers pays ont déjà un système de points en place, mais leurs dispositifs sont beaucoup plus restrictifs que celui au Canada.

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  • Selon Jeanette Süẞ, des « partenariats migratoires seront nécessaires pour une gestion plus équitable des flux ». L'Allemagne a même nommé un nouveau responsable en la matière, l'ancien ministre Joachim Stamp.

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>> Lire l'article sur le site de Radio-Canada <<

 

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