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A Port-Soudan, Poutine s'ancre en Afrique

Interventions médiatiques |

cité par Charlotte Lalanne pour

  L'Express
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Le président russe a jeté son dévolu sur cette zone stratégique, où il compte implanter une base militaire navale.

Contenu intervention médiatique

Voilà au moins un sujet sur lequel Omar El-Béchir, qui ne jurait que par Moscou, n'a pas été désavoué par ses successeurs. Accueilli, en novembre 2017, par un Vladimir Poutine tout sourire dans sa datcha de Sotchi, au bord de la mer Noire, l'ex-chef de l'Etat soudanais plaidait alors pour la création d'une base militaire russe dans son pays. Trois ans et une révolution plus tard, le voeu du tyran déchu, actuellement emprisonné à Khartoum, est en passe d'être exaucé. Le président russe a signé, début novembre, un projet d'accord bilatéral en vue de la construction d'une implantation navale à Port-Soudan, la première sur le continent depuis la chute de l'URSS. Un avant-poste modeste (quatre bâtiments et 300 personnes), mais situé dans une zone hautement stratégique entre Afrique, Asie et Europe, sur la mer Rouge, où transitent chaque année 40 % du commerce maritime mondial. C'est aussi la plus courte route pour relier les ports russes du Nord, de la Baltique et de la mer Noire aux côtes extrême-orientales et africaines. 

La Russie s'intéresse depuis plusieurs années à cette région très instable, où ses concurrents sont omniprésents - la France, les Etats-Unis, le Japon et la Chine ont une base à Djibouti, la Turquie est installée en Somalie. "Il est de notre devoir de rattraper le temps perdu sur le continent", déclarait Vladimir Poutine en 2009. A l'époque, le maître du Kremlin avait déjà conclu quelques partenariats militaires - son atout maître - avec l'Algérie et l'Egypte. Sur le flanc est, c'est à la porte de Khartoum qu'il va frapper. "Poutine suit le même chemin que la Chine, entrée au début des années 2000 sur en Afrique par le Soudan, un Etat paria, sous sanctions internationale, notamment pour des crimes de guerre commis au Darfour", analyse Thierry Vircoulon, chercheur à l'Institut français des relations internationales. Alors au pouvoir, Omar El-Béchir, en quête d'alliés, prend fait et cause pour la Russie. En 2014, il vote à l'ONU en faveur de l'annexion de la Crimée, condamnée par la communauté internationale. 

 

Sécurité contre concessions

Vladimir Poutine, qui voit alors les marchés européens se fermer, cherche de nouveaux débouchés. Son envoyé spécial pour l'Afrique, Mikhaïl Bogdanov, s'y rend 50 fois entre 2014 et 2019, tandis que, dans l'ombre, un autre personnage travaille aux intérêts du président russe : Evguéni Prigogine, homme d'affaires à la réputation sulfureuse, artisan de la formule "sécurité contre concessions minières". Lié à la société de mercenaires Wagner comme au groupe M-Invest, qui a signé en novembre 2017 des permis d'exploitation de mines d'or au Soudan, ce proche de Poutine va bientôt proposer ses services en République centrafricaine voisine, où sont envoyés, dès 2018, des "instructeurs militaires" en échange de juteux contrats.  

"Le Soudan sert de tremplin à la Russie vers l'hinterland africain", décrypte Igor Delanoë, directeur adjoint de l'Observatoire franco-russe. Avec des moyens limités, Moscou joue sur son expérience en matière de contre-terrorisme pour appâter les dirigeants... et leur population, à coups de campagnes anti-occidentales distillées sur les réseaux sociaux. Une petite musique arrivée jusqu'à Bamako, où des pancartes frappées des drapeaux malien et russe ont fait leur apparition ces derniers mois dans les manifestations antigouvernementales, pour réclamer le départ de l'opération militaire française Barkhane. Et un coup de pouce de Moscou. 

 

> Lire l'article sur le site de L'Express

 

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Thierry VIRCOULON

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Chercheur associé, Centre Afrique subsaharienne de l'Ifri

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