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Politique, économie, social… Allemagne, la grande panne

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intérrogé par Mériadec Raffray dans

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Notre voisin d'outre-Rhin n'est pas encore le nouvel “homme malade de l'Europe”, mais il cumule de sérieuses difficultés politiques, économiques et sociales.

Contenu intervention médiatique

La coalition dehors, des nouvelles élections en 2024, réclament les banderoles recouvrant le capot des milliers de tracteurs et de camions qui ont paralysé tout Berlin le 15 janvier. Cette journée est le point d’orgue de la colère des agriculteurs allemands contre la coalition “feu tricolore” au pouvoir depuis 2021. « Ils ne sèment pas, ils ne récoltent pas non plus ; mais ils savent tout mieux que tout le monde », disent les paysans à propos du fragile attelage exécutif formé par les socialistes du SPD, les libéraux-démocrates du petit FDP et des Verts – les rouges, les jaunes et les verts. Les campagnes sont en colère contre Berlin, et près de 70 % des Allemands le comprennent, indiquent les sondages. Mi-novembre, le ton est vite monté quand le gouvernement annonce, en particulier, la suppression en 2024 de la fiscalité avantageuse sur le gazole agricole. Une niche fiscale à seulement 920 millions d’euros, mais dont le pouvoir justifie l’extinction en expliquant que ce secteur est « ultrasubventionné ». L’argument achève de mettre le feu aux poudres.

Il est déjà trop tard quand l’exécutif tente d’éteindre l’incendie naissant en concédant un étalement sur plusieurs années. Le 4 janvier, quelques dizaines d’agriculteurs déterminés montent à l’abordage du ferry qui ramène de vacances sur une île de la mer du Nord le ministre vert de l’Économie, Robert Habeck, et sa famille. [...]
 
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Scholz, recordman de l’impopularité depuis  l’après-guerre.
 
Déjà passé à la postérité pour avoir battu le record d’impopularité chez les dirigeants allemands de l’après guerre (19 % l’apprécient encore), Olaf Scholz avait pourtant bien anticipé les difficultés actuelles. Dans une tribune au journal le Monde du 22 juillet 2022, l’ancien maire de Hambourg écrivait : « Après le tournant historique qu’a constitué l’attaque de Poutine contre l’Ukraine, rien ne sera plus comme avant. »
 
Ce choc, confirme aujourd’hui le chercheur Éric-André Martin dans une note de l’Institut français des relations internationales (Ifri), a refermé « la parenthèse heureuse qu’a connue l’Allemagne depuis la fin de la guerre froide […], une période durant laquelle Berlin a péché par excès de confiance dans son modèle économique et s’est accroché à un faux sentiment de sécurité ».
 
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Cette Allemagne de 83 millions d’habitants, « ébranlée par des difficultés qu’elle pensait jusqu’alors réservées à la France, qui a du mal à se projeter en 2024 » (Éric-André Martin), redoute par-dessus tout les prochaines échéances électorales. Les européennes, au printemps, dont le mécanisme de la proportionnelle intégrale est favorable aux jeunes partis, puis, en septembre, les régionales dans trois grands Länder de l’Est : la Saxe, la Thuringe et le Brandebourg. Dans ces circonscriptions, les sondages créditent l’AfD de 34 à 36 % des voix, devant la CDU-CSU, autour de 30 %, et le SPD, tombé à moins de 10 %.
 
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Le “cordon sanitaire” contre l’extrême droite demeure très solide
 
Cette arithmétique a conduit Friedrich Merz à tester l’idée d’alliances locales avec la droite radicale, qui a conquis ses premiers bastions locaux l’année dernière. La simple évocation de cette hypothèse a déclenché une levée de boucliers et des manifestations. Le “cordon sanitaire” contre l’extrême droite demeure vivace outre-Rhin. D’où le scénario privilégié par certains en cas de démission anticipée de la coalition : une reconstitution de son décalque de droite, entre les Verts, les centristes et la CDU-CSU.
 
  • Pour survivre, souligne Éric-André Martin, l’équipe Scholz « a déjà avalé de nombreuses couleuvres », qui ont contribué à brouiller un peu plus son image.

Cet automne, les Verts ont révolté les ménages en bataillant pour que le gouvernement impose en 2024 le remplacement de toutes les chaudières à gaz par des modèles à énergie renouvelable. Scholz a finalement réduit le périmètre aux logements neufs. [...]

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À l’inverse, c’est toujours l’unanimité sur le soutien exemplaire à l’Ukraine qu’une proportion croissante de l’opinion rejette et dont témoigne le veto du Bundestag à la cession de missiles airsol Taurus à Kiev, les concurrents du Scalp dont la France annonce l’envoi de 40 exemplaires supplémentaires. Revendiquant avoir débloqué 17 milliards d’euros pour l’Ukraine depuis le début de la guerre, le chancelier a annoncé le doublement de son effort annuel (de 4 à 8 milliards) tout en rappelant à l’ordre ses “voisins” trop frileux. Encore une pierre dans le jardin français.
 
  • Où l’on suit avec inquiétude les évolutions de ce pays « trop grand pour l’Europe et trop petit pour le monde », selon la formule d’Henry Kissinger, qui détient « la clé de tous les débats importants », rappelle Éric-André Martin.

 

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Éric-André MARTIN

Éric-André MARTIN

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Ancien secrétaire général du Comité d’études des relations franco-allemandes (Cerfa) de l'Ifri