Pendant que les prix du gaz flambent, le charbon brûle
Dans un contexte de forte reprise économique, la consommation de charbon dit thermique, destiné à la production d’électricité, atteint des niveaux désormais supérieurs à ceux d’avant le Covid-19.
Le roi est mort, vive le roi, en quelque sorte. La crise actuelle des prix de l’énergie a redonné de l’élan au « roi charbon » (« King Coal »), son vieux surnom. En dépit de son statut d’énergie la plus polluante, ce combustible fossile brûle à nouveau de mille feux. « La consommation mondiale de charbon augmente fortement », constate l’Agence internationale de l’énergie, dans son rapport, le World Energy Outlook, publié le 13 octobre. Toutes énergies confondues, ce regain charbonnier conduit à la « deuxième augmentation annuelle la plus importante » des émissions de dioxyde de carbone (en valeur absolue) ; lesquelles causent le réchauffement climatique.
La consommation de charbon dit thermique, destiné à la production d’électricité, atteint des niveaux désormais supérieurs à ceux d’avant le Covid-19 : 6 528 millions de tonnes pour l’année en cours, du jamais-vu depuis 2014, selon les données de la société britannique CRU Group. A elle seule, la Chine pèse plus de la moitié de ce total. Pour autant, du fait du développement des énergies renouvelables, la part du charbon diminue de façon tendancielle dans le mix électrique : il représente encore 35 % à l’échelle mondiale… et 60 % à celle de la Chine.
« Contradiction complète »
« La demande de charbon augmente dans les pays en développement comme dans ceux développés », précise le cabinet de conseil Capgemini dans son propre panorama, publié ce mois-ci également. Pour les membres du G20, les vingt pays les plus riches de la planète, cette demande avait régressé de 4 % en 2020. Mais elle devrait « rebondir » à + 5 % en 2021. Au-dessus, donc, des chiffres de 2019, souligne le World Energy Markets Observatory.
Dans un contexte général de forte reprise économique post-Covid, le charbon doit son retour en particulier à la flambée des cours du gaz, un autre combustible fossile, mais tout de même moins polluant. En Europe, ils augmentent notamment en raison de stocks bas et d’une dépendance aux volumes livrés par la Russie et la Norvège. Plus ces prix progressent, plus ceux du charbon apparaissent intéressants pour répondre à la demande des particuliers comme des industriels.
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« En Europe, il s’agit d’une voie de recours par défaut », rappelle Marc-Antoine Eyl-Mazzega, directeur du Centre Énergie et Climat de l’Institut français des relations internationales (IFRI). Pour les pays émergents, par exemple en Inde, la dépendance au charbon s’en ressent encore davantage. « Les pays ont des besoins en électricité à satisfaire à tout prix. Ils n’ont pas le luxe d’attendre l’installation de parcs solaires, ou de surcroît, de centrales nucléaires. » Par ailleurs, « bien souvent, la question du charbon implique des enjeux sociaux immenses dans les pays, enjeux exacerbés par la sortie de crise due à la pandémie. Des populations appauvries travaillent dans l’industrie minière et dépendent de cette électricité souvent pas chère. »
Pour Carole Mathieu, spécialiste de l’énergie et des politiques européennes à l’IFRI, « les considérations de dépendance aux énergies fossiles et de sécurité énergétique pourraient convaincre Xi Jinping (le chef d’État chinois) d’attendre encore avant de s’engager sur un plafonnement des émissions en 2025 ou une forte réduction de la consommation de charbon, et l’argument du développement économique et de la reprise risque de primer. » Or, à l’approche de la 26e conférence des Nations unies sur le climat (COP26), prévue en Ecosse à partir du 1er novembre, les organisateurs britanniques ont déjà indiqué leur volonté qu’« une coalition de pays s’engage pour des dates de sortie définitives du charbon, pour 2030 dans le cas des pays développés, et 2040 dans le cas de ceux en développement ».
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