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Pacifique Sud : pourquoi la Chine inquiète, en quatre questions

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cité par Anna Lipert dans

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Elles se situent à plusieurs milliers de kilomètres des côtes chinoises et pourtant, Pékin avance ses pions sur les îles du sud du Pacifique. Le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi a achevé début juin une visite de dix jours dans les Etats insulaires du Pacifique Sud, visant à promouvoir la coopération avec la Chine.

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Le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi a achevé début juin une visite de dix jours dans les Etats insulaires du Pacifique Sud, visant à promouvoir la coopération avec la Chine.

Cette tournée diplomatique a eu lieu peu après l'annonce de la signature, en avril, d'un pacte de sécurité entre la Chine et les Îles Salomon. Cet accord avait déjà soulevé l'inquiétude de Canberra et Washington quant aux ambitions militaires de Pékin. Voici 4 questions pour comprendre pourquoi le jeu diplomatique de la Chine dans cette région fait parler.

 

1 · Pourquoi parle-t-on du Pacifique Sud ?

Fin avril, les îles Salomon et la Chine ont annoncé avoir signé un pacte de sécurité . Si les termes de l'accord sont restés secrets, une version préliminaire avait fuité quelques semaines plus tôt. Ce document comprenait des propositions autorisant le transit de navires miliaires par cet archipel situé à moins de 2.000 km des côtes australiennes. L'accord évoquait par ailleurs la possibilité pour le gouvernement des îles Salomon de faire appel aux forces de l'ordre chinoises pour « aider au maintien de l'ordre social » dans ce pays secoué en 2021 par des émeutes.

Plus récemment, fin mai, un voyage de dix jours du ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi dans le Pacifique sud a confirmé la volonté de Pékin de s'affirmer dans cette région. Cette visite s'est achevée sur un refus des dirigeants des îles du Pacifique Sud de signer un « Plan d'action quinquennal Chine-pays du Pacifique pour le développement commun », destiné à renforcer la coopération économique et sécuritaire entre la Chine et dix Etats du Pacifique. Wang Yi a néanmoins achevé son voyage en ayant signé plusieurs accords dont les détails ne sont pas connus.

 


2 · Pourquoi ces événements inquiètent-ils ?

L'intérêt de la Chine pour cette région habituellement dans la sphère d'influence de l'Australie n'est pas nouveau.

Mais l'accord avec les Îles Salomon « a vraiment alarmé de manière très aiguë les observateurs, surtout les Etats-Unis, l'Australie et la Nouvelle-Zélande. Certains y ont vu une stratégie de la Chine pour monter en puissance dans la région », décrypte Marc Julienne, spécialiste de la Chine à l'Ifri (Institut français de relations internationales).

Canberra et Washington s'inquiètent en effet depuis longtemps de voir la Chine construire une base navale dans cette zone.

Pour Marc Julienne, un droit d'escale de la marine chinoise ne pose pas nécessairement les jalons d'une présence militaire ou d'une future base navale dans cette région. Quant à l'envoi de policiers pour le maintien de l'ordre sur l'archipel des Salomon, « la Chine a beaucoup à perdre et peu à gagner », commente le chercheur.

Mais d'autres observateurs sont plus alarmistes.

Même s'il faut « considérer la question de manière sérieuse », selon Marc Julienne pour qui la progression de l'influence chinoise alarme « à juste titre » l'Australie et les Etats-Unis.

Pour la spécialiste de l'Indo-Pacifique Cleo Paskal, interviewée par « Le Monde » , la présence de la Chine dans les îles du Pacifique dessine un contrôle des mers pertinent en cas de guerre autour de Taïwan. Les tensions autour de l'Etat insulaire sont en effet montées d'un cran ces dernières semaines sur fond de passes d'armes entre la Chine et les Etats-Unis, faisant craindre un conflit dans la zone.

 

3 · Quelles sont les ambitions de la Chine ?

L'ambition militaire de la Chine est celle qui préoccupe le plus les Australiens et les Américains. Et pour cause, « l'Australie n'est pas loin, les Etats-Unis non plus, il est donc utile pour la Chine d'avoir une présence forte dans cette zone », explique Marc Julienne. Selon la chaîne américaine CNN , les deux pays craignent qu'une présence militaire chinoise permanente ne perturbe voire menace la présence militaire australienne et américaine dans la région, ou serve de base arrière à des attaques.

Mais « les intérêts de la Chine dans le Pacifique sont multiples », selon Marc Julienne, avec en toile de fond une compétition stratégique entre la Chine et les Etats-Unis partout dans le monde. D'abord, « le Pacifique sud se situe entre la Chine et les Etats-Unis, et toute prise diplomatique sur les alliés d'une autre puissance est une victoire », avance le chercheur.

L'intérêt diplomatique de la Chine est surtout lié à Taïwan. L'Etat insulaire n'est en effet reconnu diplomatiquement que par 14 pays dans le monde, dont quatre se trouvent dans le Pacifique Sud. Pékin pourrait donc faire pression sur les alliés de Taïwan, alors que les îles Salomon et Kiribati avaient renversé le jeu des alliances au profit de la Chine en 2019, ne reconnaissant plus l'île comme un Etat indépendant.

Par ailleurs, selon le spécialiste de la Chine à l'Ifri, Pékin offre aussi ses technologies de télécommunications à certains Etats du Pacifique, « pour créer une certaine dépendance avec les pays qui en bénéficient. Cela permet aussi l'espionnage et l'écoute dans la région », affirme ce dernier. La Chine serait enfin intéressée par les ressources naturelles présentes dans ces archipels, notamment le lithium .

 

4 · Comment les puissances traditionnellement présentes dans la région ont-elles réagi ?

La réaction des Etats-Unis et de l'Australie ne s'est pas fait attendre. Plusieurs hauts responsables ont été dépêchés dans la région par les deux pays. Le nouveau gouvernement australien s'est quant à lui évertué d'affirmer son « réengagement dans la région ». Le Premier ministre Anthony Albanese a par exemple assuré que son gouvernement s'engagerait davantage en matière de lutte contre le réchauffement climatique , un sujet très scruté dans les Etats insulaires du Pacifique. Lors d'un déplacement aux îles Fidji, la ministre australienne des Affaires étrangères Penny Wong a par ailleurs rappelé que l'Australie était un partenaire « fiable » et « de confiance ». Les Etats-Unis ont, eux, mis en garde les îles du Pacifique contre des « accords obscurs, vagues et peu transparents » avec la Chine.

Ce que plusieurs observateurs qualifient d'excès de confiance de la part de Pékin a donc entraîné un regain d'intérêt des puissances traditionnelles de la région pour ces Etats insulaires.

  • La Chine a « créé une inquiétude, qui va entraîner une action contraire des Etats-Unis et de l'Australie, et on le voit déjà », analyse Marc Julienne.

La Chine a, quant à elle, appelé à ne pas s'inquiéter de ses projets dans la région. Les dirigeants des dix Etats concernés par l'accord rejeté fin mai ont dénoncé le fait de n'avoir pas pu se réunir pour discuter de la proposition de la Chine. Ils continueront à discuter des termes de l'accord, a affirmé Pékin, qui veut montrer que le document n'est pas enterré.

 

> Retrouvez l'article complet sur le site des Echos

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Marc JULIENNE

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Directeur du Centre Asie de l'Ifri
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