Le dessalement de l’eau de mer en plein essor malgré son coût environnemental
Multipliée par cinq en vingt ans, la production d’eau dessalée est critiquée pour sa forte consommation d’énergie fossile et ses rejets polluants dans l’environnement marin.
La Planète bleue cherche de l’eau douce. Alors que les ressources s’amenuisent dans les nappes souterraines et que la moitié des grands lacs déclinent, la demande mondiale grimpe d’environ 1 % par an. A l’origine de cette hausse continue : le changement climatique, la croissance démographique, la surconsommation, l’agriculture de plus en plus irriguée, l’industrie qui se développe. Pour répondre à ces besoins, le XXIe siècle s’est donc rabattu sur l’océan. Malgré une moindre qualité des eaux marines (fuites d’hydrocarbures, efflorescences d’algues, pollutions diverses…) et des conséquences environnementales encore à évaluer, la production d’eau dessalée a été multipliée par cinq en vingt ans.
[...]
Procédé énergivore
Si le stress hydrique compte beaucoup dans le développement historique de ce procédé dans le golfe Persique – des premières installations y fonctionnaient déjà dans les années 1950 –, les ressources locales en pétrole et en gaz ont aussi joué un rôle essentiel. Le dessalement est énergivore, ce n’est pas son moindre défaut.
[...]
« Aujourd’hui, rien ne freine l’essor du dessalement. Le contexte inflationniste a, un peu, ralenti certains projets, mais rien de plus, observe Marc-Antoine Eyl-Mazzega, directeur du centre Energie & Climat de l’Institut français des relations internationales (IFRI). Car, depuis la pandémie de Covid, certains pays, notamment au Proche-Orient, veulent renforcer leur agriculture irriguée, l’industrie minière est demandeuse en Amérique du Sud, et partout la production d’hydrogène va nécessiter beaucoup d’eau… »
Les importantes émissions de gaz à effet de serre constituent la principale critique à l’égard de ce secteur : elles accélèrent le réchauffement climatique… qui augmente à son tour la demande en eau.
Or, selon l’expert de l’IFRI, le dessalement va continuer à croître grâce aux énergies fossiles, plutôt qu’aux renouvelables, qui restent très minoritaires. Des installations photovoltaïques et éoliennes couplées pourraient pourtant être adaptées en bord de mer.
« Comme la climatisation ou le plastique, les usines de dessalement sont des bombes climatiques à venir, glisse-t-il. Malheureusement, quand il y a une forte demande, on a tendance à produire, produire, sans réfléchir à la gouvernance de l’eau ni aux pertes dans les canalisations. Après avoir longtemps subventionné l’eau sans compter, certains gouvernements commencent d’ailleurs à se dire que ce n’est pas tenable. » Dans une analyse publiée en septembre 2022 et cosignée avec Elise Cassignol, Marc-Antoine Eyl-Mazzega rapporte que dessaler 1 000 mètres cubes requiert l’équivalent d’environ 27 tonnes de pétrole.
> à lire en intégralité dans le Monde
Média
Partager