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La lancinante recherche d'une sortie de crise pour l'Afrique

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interwievé par Jacques Hubert-Rodier pour

  les Echos
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Le président Emmanuel Macron a relancé l'idée d'un plan Marshall pour l'Afrique afin d'aider le continent à renouer avec la croissance après la pandémie de Covid-19. Une idée généreuse mais difficile à réaliser et qui ne répond pas à toutes les difficultés du continent africain.

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Un plan Marshall pour l'Afrique ? Pourquoi pas ? Mais un tel projet se heurte à de nombreux obstacles et ne résout pas les problèmes de fond de l'Afrique subsaharienne.

Dans une interview au « Journal du Dimanche », le président Emmanuel Macron a repris l'idée de lancer pour l'Afrique « l'équivalent » du « Programme de rétablissement européen ». Aux lendemains de la Deuxième Guerre mondiale, pour contribuer à la reconstruction de l'Europe, les Etats-Unis, suivant les recommandations du général George Marshall, secrétaire d'Etat d'Harry Truman, ont prêté 13 milliards de dollars de 1948 à 1952 à 16 pays européens, dont l'Allemagne (soit environ l'équivalent de 143 milliards de dollars en 2021). L'objectif du président français est d'investir massivement dans les économies africaines pour les aider à sortir de la crise économique aggravée par la pandémie du Covid-19.

Le FMI au secours de l'Afrique

L'initiative du président français, qui a organisé en mai un sommet à Paris sur le financement des économies africaines avec la participation « en présentiel » de plus de 20 chefs d'Etat et de gouvernement africains, des chefs de gouvernement européens et des responsables d'organisations multilatérales avant d'accueillir à Bordeaux, du 8 au 10 juillet, plus de 1.000 représentants de la société civile africaine (entrepreneurs, enseignants, sportifs…), a été saluée en Afrique.

Comme celle prise par le Fonds monétaire international (FMI) d'allouer de nouveaux DTS (droits de tirage spéciaux) pour l'équivalent de 650 milliards de dollars dont 34 milliards pour le continent africain, auxquels devrait s'ajouter une réallocation d'une partie des nouveaux DTS attribués aux pays riches. Le FMI estime les besoins de financement supplémentaires de l'Afrique d'ici à 2025 à 285 milliards de dollars.

Pourtant, on est encore loin du compte, et il faudrait au moins trois plans Marshall pour faire face aux besoins post-Covid de l'Afrique. « Les besoins de financement de l'Afrique sont abyssaux », déclarait le président du Niger, Mohamed Bazoum, dans une interview aux « Echos » : 400 milliards de dollars permettraient juste de faire face à la situation post-Covid, mais pas de régler tous les problèmes de l'Afrique, a-t-il ajouté.

Le plan de Lagos de 1980

Un plan Marshall pour l'Afrique est une proposition qui est revenue souvent, comme celle faite en 2017 par le ministre allemand de la Coopération économique et du Développement, Gerd Müller, ou celle contenue dans le plan de Lagos, adopté en 1980 par l'Organisation de l'unité africaine (Union africaine depuis 2002), qui, elle, visait à réduire la dépendance à l'égard de l'aide occidentale. Mais cette idée est difficile à mettre en oeuvre.

  • Un plan Marshall de plusieurs dizaines ou centaines de milliards de dollars pour l'Afrique « présuppose que l'aide soit efficace et que les pays récipiendaires aient les capacités de l'absorber, faute souvent de projets à financer », affirme Alain Antil, directeur du Centre d'études subsahariennes de l'Ifri (Institut français des relations internationales).

Lors du sommet de Paris, le président du Sénégal, Macky Sall, a souligné sa préférence pour « un nouveau New Deal, à défaut d'un plan Marshall pour l'Afrique » qui risquerait d'accroître la dépendance des pays africains à l'égard de leurs créanciers.

Gouvernance économique

Mais dans les deux cas, aucune de ces mesures ne répond vraiment aux questions de fond des économies africaines. Le Nepad (Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique), lancé en grande pompe en juillet 2001, à Lusaka, en Zambie, et devenu en 2018 l'Agence de développement de l'Union africaine, est loin d'avoir eu les effets escomptés par ses promoteurs.

Plan Marshall ? New Deal ?

  • D'après Alain Antil, « il faut se défaire de slogans et d'abord avoir le courage de parler sérieusement de la gouvernance économique des partenaires au sud du Sahara » et de fuite des capitaux. « Pourquoi les capitaux des pays subsahariens vont se placer ailleurs ? Comment inciter les nationaux à investir dans leur pays plutôt que de chercher des paradis fiscaux ? »


« Au-delà de la question de la corruption, il faudrait éviter que les entrepreneurs nationaux soient obligés d'être proches des pouvoirs politiques pour accéder aux grands marchés publics ou pour avoir un accès plus facile aux crédits bancaires », souligne le chercheur.

Annulation de la dette africaine

En outre, selon l'analyste, également enseignant à l'IEP de Lille et à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, il est nécessaire de prolonger la réflexion sur l'annulation des dettes africaines ou sur leur moratoire, en incluant la Chine, qui est le principal détenteur de dettes en bilatéral, et en tentant d'associer les prêteurs privés. Vue l'augmentation très forte ces dernières années des eurobonds, cet endettement pèse lourdement sur les économies africaines.

Les pays d'Afrique subsaharienne vont également devoir faire un effort de diversification de leurs économies, trop souvent dépendantes des matières premières et, donc, très exposées aux fluctuations des cours de ces produits sur les marchés internationaux.

  • Le pétrole représente au Nigéria 15 % de son PIB mais compte pour les deux tiers du financement de son budget et pour plus de 90 % de ses exportations, fait remarquer Alain Antil.

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Alain Antil

Alain ANTIL

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Directeur du Centre Afrique subsaharienne de l'Ifri