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Guerre en Ukraine : pourquoi la Chine pourrait profiter de l'affaiblissement de la Russie

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entretien avec Elisabeth Pierson pour

  Le Figaro
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ENTRETIEN - Le nouveau ministre chinois de la Défense, Li Shangfu, a choisi Moscou pour son premier voyage à l'étranger. L'objectif, «dissuader les Occidentaux», selon le chercheur Marc Julienne.
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Moins d'un mois après la visite de Xi Jinping à Moscou, son nouveau ministre de la Défense a choisi la Russie pour son premier déplacement à l'étranger, redisant lundi sa «détermination» à renforcer la coopération bilatérale de défense. «Nous avons des liens très forts, qui dépassent les alliances militaro-politiques de l'époque de la Guerre froide», a notamment salué Li Shangfu lors de sa rencontre avec Vladimir Poutine.
 
Docteur en Science politique et relations internationales, Marc Julienne est chercheur à l'Institut français des relations internationales (Ifri), responsable des activités Chine au sein du Centre Asie, et enseigne à l'INALCO.

 

 

LE FIGARO. - Que faut-il retenir de cette première visite de Li Shangfu à l'étranger en tant que ministre de la Défense ?
 
Marc JULIENNE. - Elle s'inscrit dans la continuité des relations bilatérales entre la Chine et la Russie. Le 4 février 2022, trois semaines avant le lancement de l'«opération spéciale» en Ukraine, Xi Jinping recevait Vladimir Poutine à Pékin. Les deux chefs d'État se sont à nouveau rencontrés à Moscou fin mars. L'objectif est d'afficher un partenariat extrêmement étroit et dissuasif à l'égard des Occidentaux, des États-Unis en particulier.
 
Le ministre chinois de la Défense s'est dit «déterminé» à renforcer la coopération avec l'armée russe. À quoi faut-il s'attendre ?

Ces propos sont en cohérence avec la dimension dissuasive de l'événement, mais j'estime qu'il y a une grande part de communication. Le ministre a promis de «promouvoir la coopération militaire et technique ainsi que le commerce militaire», mais il n'y a eu aucune annonce concrète ni sur le dossier ukrainien, ni sur d'éventuels échanges d'armements.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, tous les regards sont braqués sur ce point : une éventuelle aide militaire chinoise à la Russie sur le théâtre ukrainien. Les États-Unis ont fait part à plusieurs reprises de leurs craintes à ce sujet. Le chef de la CIA s'est dit «convaincu» de l'intention de Pékin de fournir des armes. Mais aucune preuve n'a encore appuyé cette idée. D'un point de vue purement analytique, cela me semble contraire aux intérêts de la Chine qui montre depuis le début du conflit une attitude de retrait : sans s’engager vers une médiation, elle ne s'aventure pas nonplus dans un soutien clair à la Russie.

En quoi consiste actuellement leur coopération de défense ?

Elle reste relativement superficielle pour ce qui est de l'entraînement et de la formation entre les armées. Du côté de la coopération technique, la Russie est traditionnellement un important pourvoyeur d’armes pour la Chine. Certes, cet équilibre dans l’industrie de défense va progressivement s'affaiblir au fur et à mesure que la Chine se renforce, mais aujourd'hui, Moscou reste encore le principal fournisseur d’armes de Pékin. La coopération de défense demeure exclusivement dans ce sens.

Quel atout la Chine tire-t-elle de cette coopération ?

Il est, à mon sens, plus probable que la Chine profite de l'affaiblissement actuel de la Russie pour négocier des concessions sur les coûts, et obtenir de nouveaux transferts d’armes et de nouvelles technologies. Cela peut aller des radars d'alerte avancée aux technologies spatiales, en passant par les systèmes antimissiles et antiaériens. Le système russe S-400, très performant, a déjà été transféré à la Chine.

Ce point me paraît sous-estimé dans les analyses de la relation sino-russe. La Chine a souvent profité de l’affaiblissement de la Russie pour la pousser à lui transférer des technologies qu’elle était jusqu’à présent réticente à lui donner. Ce fut le cas après la guerre de Crimée en 2014. Pékin s'est montré un partenaire essentiel pour briser aux yeux du monde l’isolement apparent de Vladimir Poutine sur la scène internationale, et la volonté d’affichage était flagrante. À partir de là, les deux puissances ont conclu des accords majeurs dans les domaines de l'énergie, du spatial et de la défense.

 

Marc Julienne : « Les Chinois n'agissent pas simplement dans l'intérêt de la Russie. Leur adversaire commun est les États-Unis, et leur bataille commune, l'ordre international dominé d'après eux par les valeurs occidentales. Il est dans leur intérêt commun d'afficher un front uni anti-occidental, auquel s'ajoutent quelques États comme la Biélorussie ou l'Iran. Dans cette coopération militaire, je maintiens toutefois que l’affichage est supérieur à la réalité. »

 

>> Entretien à retrouver en intégralité sur le site Le Figaro

 

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Marc JULIENNE

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