Elon Musk tente de s’immiscer dans les élections législatives en Allemagne (et ça n’augure rien de bon pour l’Europe)
Le patron de Tesla a explicitement apporté son soutien à l’extrême droite en Allemagne, à un peu plus d’un mois des élections qui devront désigner le successeur d’Olaf Scholz.
Après s’être fait une place de choix dans l’administration Trump aux États-Unis, Elon Musk semble désormais décidé à jouer un rôle dans les affaires européennes. Outre sa proximité mise en scène avec Giorgia Meloni et des relations orageuses avec Nigel Farage, figure du Brexit, le patron de Space X s’intéresse surtout à l’Allemagne.
Sur son réseau social X, le milliardaire s’est livré fin 2024 à une attaque frontale contre le chancelier Olaf Scholz, le qualifiant d’« imbécile incompétent ». Il est ensuite allé plus loin en déclarant que « seule l’AfD peut sauver l’Allemagne ». Ce soutien explicite au parti d’extrême droite s’est prolongé dans une tribune publiée dans Die Welt, un quotidien de référence en Allemagne.
Or ces prises de position interviennent dans un moment bien particulier : l’Allemagne se prépare à des élections législatives, qui auront lieu le 23 février prochain. Alors que l’Alternative pour l’Allemagne (AfD) est créditée de la deuxième place dans les sondages, juste derrière les conservateurs de l’Union chrétienne-démocrate (CDU), les déclarations de Musk ont provoqué un tollé parmi les partis traditionnels, qui dénoncent une ingérence étrangère.
Cette indignation ne semble toutefois pas dissuader Elon Musk. Ce jeudi 9 janvier, il a ainsi convié la dirigeante de l’AfD, Alice Weidel, à une discussion retransmise en direct sur X, comme il l’avait fait avec Trump quelques semaines avant l’élection américaine.
- « Cette discussion en ligne va lancer la campagne », observe auprès du HuffPost Paul Maurice, secrétaire général du Comité d’études des relations franco-allemandes à l’Ifri (Institut français des relations internationales). « On attendait un début de campagne en janvier, mais un début de manière traditionnelle avec des conférences, des articles avec les médias traditionnels, etc. », souligne l’expert. C’est finalement sur X que la course pour le poste de chancelier va commencer, avec un tapis rouge déroulé pour l’extrême droite.
L’image d’un businessman à succès pour redorer l’AfD
L’engagement d’Elon Musk dans la politique allemande n’est pas dénué d’intérêts personnels. Le milliardaire a ouvert en 2022 en Allemagne le premier site de production de Tesla en Europe, dans le Land de Brandebourg, où il continue d’investir pour développer son activité dans les véhicules électriques. Son soutien à l’AfD pourrait donc servir, en partie, à protéger et à renforcer ses intérêts dans la région.
Pour l’AfD, le soutien de l’homme d’affaires est une véritable aubaine. Le parti d’extrême droite « n’aurait pu rêver d’un meilleur militant qu’Elon Musk », estime ainsi Johannes Hillje, expert en communication politique, dans les colonnes du Spiegel. Alors que le parti tente de rassurer l’électorat conservateur allemand au sujet de son programme économique, « Musk apporte l’image d’un entrepreneur visionnaire et couronné de succès », abonde Carsten Koschmieder, politologue à l’université de Berlin.
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Plus intéressant encore, ce rapprochement avec le milliardaire confère à l’AfD une légitimité sur la scène internationale. « Musk travaille désormais main dans la main avec Donald Trump, récemment réélu aux États-Unis. Cela envoie un message clair aux électeurs : l’AfD pourrait devenir un interlocuteur crédible pour Washington », analyse Paul Maurice.
Secrétaire général du Comité d'études des relations franco-allemandes (Cerfa) à l'Ifri
Le parti d’extrême droite reste « marginalisé » en Allemagne
Malgré son succès lors des dernières élections, l’AfD reste néanmoins marginalisé dans le paysage politique allemand. Contrairement au Rassemblement national (RN) en France, qui a entrepris une stratégie de dédiabolisation, le parti n’a pas cherché à adoucir son image.
- « L’AfD demeure un parti extrêmement radical, avec des membres dont certains entretiennent des liens avec des mouvements néonazis », souligne Paul Maurice. « À ce jour, aucun autre parti allemand ne serait prêt à collaborer avec l’AfD ».
Les sondages, pour l’heure, semblent confirmer cette méfiance : la CDU, portée par Friedrich Merz, reste en tête des intentions de vote. L’électorat, préoccupé par l’instabilité économique du pays, trouve de la sécurité dans le profil de cette figure classique de la droite allemande.
- « C’est un personnage un peu “has been”, qui incarne ce qui fonctionnait en Allemagne dans les années 1980. Il est l’héritier d’Helmut Kohl », dépeint Paul Maurice.
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>> >> Cet article est disponible sur le site Le HuffPost.
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