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De l'importation d'un conflit

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  Le Figaro
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La rhétorique sur l'importation en France du conflit israélo-palestinien n'est pas nouvelle. Pendant la deuxième intifada, déjà, elle s'était répandue dans le discours politique comme une traînée de poudre. Elle fait peur et laisse entendre que les violences - notamment à caractère antisémite - qui émergent à chaque recrudescence du conflit israélo-palestinien pourraient rapidement changer de nature et se transformer en guerre, parallèlement à celle qui se déroule dans la bande de Gaza.

Pourtant, depuis la deuxième intifada, les résonances violentes du conflit israélo-palestinien en France relèvent davantage de la délinquance que de la guerre ou même du terrorisme. La situation est bien différente de celle des années 1970 où une véritable stratégie d'exportation du conflit s'était traduite par des attentats de groupes palestiniens sur le territoire national et par des assassinats ciblés de représentants de l'OLP à Paris par les services secrets israéliens. Cette internationalisation de fait du conflit a progressivement cessé à partir de la fin des années 1980, la première intifada annonçant une refocalisation de la lutte sur le Proche-Orient.

Aujourd'hui, l'impact le plus visible de la guerre au Proche-Orient sur le territoire national se situe dans le champ du militantisme. Les Parisiens peuvent difficilement ignorer les manifestations imposantes qui traversent régulièrement la capitale. La plupart d'entre elles - dont celle qui a réuni plus de 30 000 personnes samedi dernier - sont organisées en soutien aux Palestiniens. La plus grande manifestation pro-israélienne a quant à elle réuni environ 10 000 personnes devant l'ambassade d'Israël, à l'appel du Crif.

D'aucuns veulent établir un lien entre les manifestations propalestiniennes et la hausse des actes antisémites. Au cours de la deuxième intifada, les auteurs d'actes antisémites qui avaient été interpellés étaient toutefois des délinquants, pas des militants. Les responsables des grandes organisations propalestiniennes consensuelles - comme l'Association France Palestine Solidarité - condamnent clairement l'antisémitisme, même si elles ne sont pas forcément en mesure de contrôler tous les slogans, notamment ceux lancés en arabe, lors de rassemblements.

Depuis les manifestations observées à l'occasion de la guerre de l'été 2006, le mouvement de solidarité avec les Palestiniens semble avoir doublement évolué. D'une part, l'heure est aujourd'hui au rassemblement. Des organisations aussi différentes que l'UOIF et la LCR se retrouvent désormais dans un même cortège. D'autre part, une certaine radicalisation du discours et des symboles des militants peut être observée.

Pendant la guerre de 2006, quelques drapeaux du Hezbollah avaient fait leur apparition sur le pavé parisien. Désormais, on les compte par dizaines et des drapeaux du Hamas sont également visibles. Signe des temps, les portraits de Hassan Nasrallah dépassent maintenant en nombre ceux de Yasser Arafat. En outre, les manifestants mettent de plus en plus en cause la politique étrangère de la France, un des slogans les plus répandus étant «Israël assassin, Sarkozy complice». Le passage du discours à la violence ne va cependant pas de soi. La guerre au Proche-Orient envenime les paroles, radicalise les esprits et contribue à créer un climat délétère favorisant peut-être le passage à l'acte individuel. Les débordements observés en marge de certains cortèges relèvent toutefois, jusqu'à présent, de l'épiphénomène. On ne peut donc pas parler pour l'heure d'une importation du conflit chez nous.

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Marc HECKER

Marc HECKER

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Directeur adjoint de l'Ifri, rédacteur en chef de Politique étrangère et chercheur au Centre des études de sécurité de l'Ifri

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