Avec Joe Biden, moins de charbon, mais plus de gaz et de renouvelables
Le nouveau président américain élu promet d’investir massivement dans les énergies renouvelables. L’objectif est aussi de rattraper le retard pris dans les technologies bas carbone.
En matière énergétique, il y a au moins un point sur lequel l’arrivée de Joe Biden à la Maison-Blanche ne devrait pas changer grand-chose. Le gaz de schiste va continuer de supplanter le charbon aux États-Unis et les renouvelables vont continuer à progresser.
Car malgré les promesses de Donald Trump faites il y a quatre ans de changer la donne, les centrales charbon ferment les unes après les autres (une dizaine de gigawatts en moins, rien que cette année), un peu partout dans le pays. En l’espace d’une décennie, leur capacité a été réduite de 20 %.
Cette tendance répond plus à une logique économique qu’à des raisons environnementales. Le gaz est tellement abondant qu’il n’a jamais été si peu cher, ce qui rend les centrales charbon de moins en moins rentables.
Niveau record de production de gaz aux États-Unis
C’est d’ailleurs la principale explication à la baisse de 14 % des émissions de CO aux États-Unis, par rapport à 2005. Au premier semestre, le charbon ne représentait plus que 17 % de la production d’électricité, contre 39 % pour le gaz et 21 % pour le nucléaire.
La production de gaz aux États-Unis devrait ainsi atteindre un niveau record cette année, grâce en particulier au gaz de schiste. Pourtant de nombreux producteurs sont actuellement en grande difficulté financière, à l’image de Chesapeake, l’un des pionniers du secteur, qui s’est déclaré en faillite au mois de juin.
Joe Biden s’est engagé à mettre en place des réglementations plus drastiques, en particulier sur les émissions de méthane. C’est le cas notamment dans l’extraction du pétrole de schiste, où les producteurs récupèrent également du gaz qui n’est pas utilisé et donc rejeté dans l’atmosphère.
Une recomposition du secteur des hydrocarbures
Le candidat démocrate a également promis d’interdire la fracturation hydraulique dans les forages effectués sur les terres fédérales, mais elles ne concernent qu’environ 10 % des zones de production. « Avec Joe Biden, il ne faut pas s’attendre à de grands bouleversements en matière de pétrole et gaz de schiste, dont le développement a été encouragé sous Barack Obama notamment pour des raisons d’indépendance énergétique, souligne Marc-Antoine Eyl-Mazzega, directeur du centre énergie et climat de l’Ifri. Mais les contraintes supplémentaires imposées aux producteurs devraient pousser à une concentration importante du secteur. »
Des milliers de petits acteurs, il ne resterait que quelques dizaines d’acteurs. « Ils auront une telle taille, qu’ils seront soumis à des contraintes extra-financières plus fortes, notamment sur le plan environnemental », estime Marc-Antoine Eyl-Mazzega.
Depuis 2017, les États-Unis sont exportateurs de gaz de schiste, en particulier vers l’Europe. Cette politique devrait continuer à être encouragée par la nouvelle administration américaine.
La montée en puissance des renouvelables
Cette année, la production électrique issue d’énergie verte devrait être supérieure à celle provenant du charbon, grâce à 20,2 gigawatts (GW) de nouvelles capacités installées. « Les États-Unis sont d’abord un pays fédéral et beaucoup d’États ont continué à soutenir les renouvelables », rappelle Colette Lewiner, conseillère énergie chez Capgemini, en soulignant que « les montants investis dans le secteur sont deux fois plus importants qu’en Europe ».
L’objectif affiché par le candidat démocrate est d’accélérer. « Mais s’il n’a pas la majorité au Sénat, Joe Biden pourrait avoir du mal à tenir des engagements », note Benjamin Louvet, analyste chez OFI Asset management.
Si l’on tient compte des projets en développement, le parc solaire devrait déjà doubler d’ici à 2025, encouragé notamment par les baisses de coût. L’éolien a également le vent en poupe, même si la vétusté des réseaux reste encore un obstacle au développement de ces énergies intermittentes.
Les grandes entreprises, comme Google ou Walmart, signent également à tour de bras, des contrats d’approvisionnement en énergies vertes (13,6 gigawatts en 2019, soit un niveau record).
Rattraper le retard technologique
Depuis plusieurs années, les États-Unis ont accumulé un retard important dans les technologies bas carbone. « Avec l’arrivée de Joe Biden, ils vont mettre les bouchées doubles pour reprendre la place de numéro un mondial et devenir de plus en plus indépendant technologiquement par rapport à la Chine », estime le directeur du Centre énergie et climat de l’Ifri. Il cite notamment la recherche dans le stockage, l’hydrogène, les voitures électriques, un domaine dans lequel les constructeurs américains sont derrière les autres (si l’on excepte Tesla).
Cette logique de retrouver le leadership devrait se voir également dans le nucléaire civil, ce qui marquerait une continuité avec la politique engagée par l’administration Trump. Les États-Unis ont ainsi lancé un important programme de recherche dans la construction de petits réacteurs.
> Lire l'article sur le site du journal La Croix
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