Algérie : « Dans les moments de crise, l’armée fait bloc »
Pour la spécialiste de l’Algérie Dalia Ghanem, des mesures coercitives contre le Hirak « seraient une terrible erreur » après la mort, lundi, du chef d’état-major et vice ministre de la défense, Ahmed Gaïd Salah.
Spécialiste de l’Algérie, Dalia Ghanem est chercheuse résidente au Carnegie et à l’Institut français des relations internationales. Elle analyse la nouvelle donne créée par la mort d’Ahmed Gaïd Salah.
La mort de Gaïd Salah ouvre-t-elle une période d’incertitude ?
Il était l’homme fort du pays depuis le départ d’Abdelaziz Bouteflika fin mars. Sa mort ouvre une période d’incertitude, mais surtout de reconfiguration des rapports de force au sommet de l’Etat. Gaïd Salah avait parachuté Abdelmadjid Tebboune à la présidence de la République. Ce dernier n’a pas été élu comme veut le faire croire le pouvoir, mais réellement « choisi » par l’armée, et notamment Gaïd Salah qui était son soutien le plus important.
Aujourd’hui, nous avons un président d’emblée très affaibli, pris en étau entre une rue qui le rejette et une armée qui l’a imposé mais à qui il devra payer le prix fort : une allégeance, sinon une soumission inconditionnelle. Le Hirak, le mouvement de protestation populaire qui a débuté en février, considère Tebboune comme illégitime et refuse de le reconnaître. C’est pour cette raison qu’une négociation est cruciale pour pouvoir lui conférer un minimum de légitimité.
ses intentions. Un recours à la ré pression ne peut émaner de lui seul, il doit procéder d’un consensus au sommet de l’état-major. Dans les moments de crise, les divers clans de l’armée font bloc. Des mesures coercitives contre le Hirak seraient une terrible erreur car elles mettraient en danger la cohésion interne de l’armée, qui est surtout une armée de conscrits, et la garante de l’unité nationale. Un schisme serait à craindre au sein de l’armée entre les officiers supérieurs et les soldats.
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