La Corée en Afrique. Entre soft power et intérêts économiques
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Les relations économiques entre la Corée et l’Afrique ont commencé à se développer à compter de 2006, année qui a marqué un tournant avec le lancement de l’année de l’amitié avec l’Afrique et l’Initiative coréenne pour le développement de l’Afrique.

Aujourd’hui, bien que les flux d’aide coréenne à destination de l’Afrique soient en constante augmentation celle-ci reste un partenaire économique de second rang pour Séoul. Ni le commerce, ni les investissements directs étrangers (IDE) ne pèsent plus de 1,5 % du total du point de vue coréen.
Les relations économiques entre la Corée et l’Afrique sont en outre concentrées sur un nombre limité de pays, mais les partenaires prioritaires de la politique de l’aide publique au développement (APD) ne sont pas les principaux partenaires commerciaux, ni les principaux destinataires des investissements coréens. Dès lors une explication mercantiliste de l’APD coréenne semble discutable.
L’une des principales raisons de l’attractivité de l’Afrique pour la Corée est la détention de ressources naturelles (pétrolières, gazières et minières) et la structure des échanges entre les deux parties reflète des rapports de type Nord-Sud (matières premières contre produits manufacturés). En cela la Corée ne se démarque pas vraiment des autres pays industrialisés présents sur le continent africain.
La Corée met largement en avant la singularité de sa trajectoire économique pour apparaître comme un partenaire différent, plus à même de contribuer au développement de ses partenaires africains, mais la réalité est tout autre.
Tout d’abord, la singularité de l’économie coréenne tient aussi à l’héritage de l’État développeur, qui associe État et entreprises. Certaines pratiques héritées de cette époque demeurent très présentes, qui privilégient la défense des intérêts économiques nationaux. Il n’est pas sûr dans ces conditions que les retombées des interventions coréennes soient nécessairement bénéfiques pour les pays récipiendaires, dont les intérêts passent au second plan.
D’autre part la Corée continue d’utiliser l’APD en Afrique comme instrument de soft power pour faire valoir l’exemplarité de son expérience de développement mais le décalage est important entre le discours et la réalité de l’expérience coréenne, ce qui entame la crédibilité du discours et son efficacité. Ainsi le mouvement des « nouveaux villages » que la Corée cherche à exporter vers l’Afrique demeure sujet à controverses. Sa contribution à la modernisation des campagnes par le biais de la responsabilisation est contestée et il n’est pas garanti que sa transposition au contexte africain soit appropriée.
Enfin, certains autres facteurs viennent entraver l’apport positif potentiel de la Corée. Ainsi les scandales à répétition et autres dysfonctionnements dans les interventions des acteurs coréens, qu’ils soient publics ou privés, pèsent sur la crédibilité du pays sur le continent. De même la complexité de la structure de la politique d’aide et la diversité des objectifs poursuivis par les différents acteurs (la Korea International Cooperation Agency [KOICA] et l’Economic Development Cooperation Fund [EDCF] en tête) ne facilitent pas la mise en œuvre d’une stratégie cohérente vis-à-vis de l’Afrique.
Vu le caractère encore récent de son engagement en Afrique la Corée y est encore en phase d’apprentissage. Des mesures prises récemment par l’administration Moon, comme la création de la Fondation Corée-Afrique, semblent aller dans le bon sens dans la mesure où elles devraient aider à l’approfondissement de la connaissance coréenne de l’Afrique et encourager l’implication du secteur privé.
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