Construire la gouvernance mondiale des énergies renouvelables : une analyse institutionnelle comparative
Au cours de ces dix dernières années, diverses organisations et initiatives internationales se sont donné comme priorités de faciliter le déploiement généralisé des énergies renouvelables (ENR) et de permettre leur intégration dans les systèmes énergétiques. L’Agence internationale de l’énergie (AIE) a été pionnière dans l’élaboration de l’architecture d’une gouvernance mondiale des énergies renouvelables.
Elle a ensuite élargi son champ d’activité initial au développement du marché de l’électricité, aux problèmes de sécurité et aux défis spécifiques des technologies à faibles émissions de carbone, notamment les ENR telles que l’éolien et le solaire. Depuis, de nouvelles institutions dotées d’un mandat spécifique mais global, telles que l’Agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA), ont été créées. À côté de ces agences intergouvernementales de l’énergie, des initiatives telles que le Renewable Energy Policy Network for the 21st Century (REN21), le Clean Energy Ministerial (CEM) et Sustainable Energy for All (SEforALL) ont été mises en place pour répondre à la nécessité d’une coopération internationale accrue entre les acteurs publics et privés, élargissant encore cette architecture de gouvernance. L’adoption récente de l’Agenda 2030 du développement durable et de l’accord de Paris sur le climat a donné un nouvel élan aux ENR et a conduit au lancement d’initiatives complémentaires telles que l’Alliance solaire internationale (ASI) ou encore l’Initiative africaine pour les énergies renouvelables (AREI).
L’AIE est la plus mature de ces institutions. Grâce à son expertise complète de l’ensemble du système énergétique, elle est aussi l’une des plus influentes. Cependant, en dépit de réels efforts pour se rapprocher des principales économies émergentes, les conditions d’adhésion limitent la portée de ses travaux, en particulier en Afrique.
L’IRENA compte cinq fois plus de membres, ce qui lui permet théoriquement de toucher davantage de pays, y compris les plus petits. Cependant, elle est encore dans une phase de montée en puissance et sa gouvernance pourrait être ralentie par ce nombre élevé de pays aux intérêts divergents.
La récente ASI, spécialisée dans la maximisation du potentiel d’énergie solaire des pays situés sous les tropiques, a un axe géographique et technologique bien défini. Il faudra attendre quelques années pour évaluer sa contribution, mais elle pourrait jouer un rôle opérationnel clé, en Afrique par exemple, dans la mesure où elle vise à relever tous les défis du déploiement de l’énergie solaire, y compris les aspects réglementaires, financiers et techniques.
Cette architecture de gouvernance, même si elle comporte plusieurs niveaux tant du point de vue géographique que technologique, est souvent complémentaire. Elle reflète plusieurs tendances sectorielles clés : la baisse des coûts des énergies renouvelables, leur déploiement généralisé, en particulier dans les économies émergentes, le développement des chaînes de valeur mondiales, dont chacune nécessite un travail commun d’analyse, de coordination et de coopération. De plus, au-delà de leurs efforts pour travailler avec les gouvernements et le secteur privé, ces institutions devront progressivement inclure le rôle et les actions du secteur non gouvernemental et des entités locales, en particulier des villes.
Enfin et surtout, elle est représentative des questions politiques et géopolitiques, liées aux stratégies des pays visant à développer des technologies ou des domaines d’intervention spécifiques et à promouvoir leurs intérêts nationaux et parfois concurrents. Les États-Unis et le Japon exercent une grande influence au sein de l’AIE, l’Allemagne soutient pleinement l’AIE et l’IRENA, tandis que l’Inde et la France sont des partenaires clés de l’ASI. La Chine est impliquée dans toutes ces institutions – elle pourrait même adhérer à l’ASI.
Comme ce sont les États membres qui définissent le mandat et le champ d’activité de ces organisations, il va de leur responsabilité de s’unir, de s’efforcer de rationaliser leurs travaux, leurs ressources et de structurer leur coopération de manière à maximiser la valeur ajoutée de chaque institution.
Cette étude est disponible en anglais uniquement : Shaping the Global Governance of Renewables: A Comparative Institutional Analysis
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