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La fin des jours heureux pour l'Opep ?

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Édito Énergie
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L’histoire ne finit pas de se répéter : 1986, 1998, 2009 et 2014, des années qui ont vu plonger les cours du brut provoquant des crises économiques et sociales dans les pays producteurs de pétrole.

Corps analyses

A chaque fois, l’effondrement des cours a rappelé la nécessité de conduire des réformes de diversification économique et d’atténuer la dépendance à l’égard du secteur des hydrocarbures, dont les recettes sont certes abondantes mais volatiles. L’histoire pétrolière est ponctuée de crises récurrentes avec des variations marquées et soudaines des prix. La période entre 2011 et 2014, caractérisée par une stabilité exceptionnelle des cours, est désormais terminée.

Offre excédentaire mondiale avec le développement des pétroles de schiste aux Etats-Unis, demande pétrolière atone dans les pays consommateurs, les raisons de l’effondrement des prix du pétrole – de plus de 50% ces derniers mois – sont multiples et bien connues. La décision des pays membres de l’Opep de novembre dernier de maintenir leur niveau de production et de ne pas enrayer la chute des prix a fait couler beaucoup d’encre, quant aux velléités réelles de l’Arabie saoudite. Elle aurait conclu un pacte secret avec les Etats-Unis, pour nuire à l’Iran et à son allié russe. Les lectures géopolitiques sont nombreuses… Dans ce paysage en bouleversement, une seule certitude : l’Arabie saoudite est déterminée à préserver sa part de marché au détriment du prix.

   
Cette chute brutale et imprévue des prix aura probablement des effets positifs sur l’économie mondiale dans sa globalité. Elle amène aussi les acteurs industriels à revisiter leurs stratégies, les compagnies pétrolières annoncent des profits en baisse et des investissements en berne. Les pays importateurs, tels que la Chine et l’Inde, seraient les grands gagnants de ce nouvel ordre pétrolier mondial. Mais les premiers à souffrir de ce krach pétrolier sont les pays de l’Opep eux-mêmes. Le manque à gagner s’élèverait à plus de 375 milliards de dollars en 2015. Tout comme la Russie, les pays de l’Opep subissent de plein fouet la baisse des revenus de leurs exportations pétrolières, qui représentent en moyenne 70% de leurs exportations totales. Des crises économiques sont annoncées au Venezuela, en Iran, au Nigeria ou en Algérie, sans évoquer la forte instabilité géopolitique dans de nombreux pays producteurs de pétrole.
 
Le syndrome hollandais
 
En cause, le syndrome hollandais, cette logique économique implacable, observée aux Pays-Bas dans les années 1970, avec l’exploitation des gisements de gaz naturel de Groningue, qui se traduit par une forte appréciation du taux de change liée à l’expansion rapide du secteur pétrolier au détriment de la compétitivité des autres secteurs de l’économie. Ce serait donc le paradoxe de l’abondance en ressources naturelles. 
    
Jusqu’en juin 2014, avec des prix du pétrole autour de 110 dollars par baril, ce spectre de la malédiction des ressources était bien loin, avec une croissance économique dans les pays producteurs de pétrole, tirée par le secteur des hydrocarbures. Mais les pays de l’Opep sont particulièrement dépensiers, avec des besoins sociaux élevés, des subventions importantes aux produits énergétiques et des programmes d’investissements ambitieux. À l’exception du Koweït, du Qatar et des Emirats arabes unis, les pays de l’Opep ont besoin d’un baril supérieur à 100 dollars pour équilibrer leur budget; la plupart affichant des budgets déficitaires en 2015.
 
Est-ce à dire que les pays de l’Opep n’ont rien fait ces dix dernières années pour se protéger contre les crises pétrolières et l’effondrement des cours? Probablement pas. De nombreux fonds souverains ont été établis, surtout dans les pays du Golfe, permettant à ces pays de puiser dans ces réserves durant les périodes d’effondrement des cours sans avoir à ajuster ou à reporter leurs dépenses d’infrastructures. Sous la houlette de quelques compagnies pétrolières internationales, les politiques de contenu local sont maintenant ancrées dans le paysage. Elles contribuent de plus en plus au développement du tissu industriel dans les pays producteurs en nouant des liens entre les activités pétrolières et gazières et les communautés locales.
 
Mais le besoin de réelles réformes économiques pour créer un secteur productif durable et compétitif reste cruel dans de nombreux pays. La réduction des subventions énergétiques massives constitue une première piste. Et si cette baisse des prix du pétrole pouvait enfin représenter une opportunité de réformes pour les pays producteurs de pétrole ?

Article paru dans L'Echo, Bruxelles, 4 mars 2015

 

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Marie-Claire AOUN

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Directrice du Centre Énergie de l'Ifri (2014-2017)

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Énergie et Climat
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Le Centre énergie et climat de l’Ifri mène des activités et recherches sur les enjeux géopolitiques et géoéconomiques des transitions énergétiques. Il travaille à la fois sur les enjeux de sécurité énergétique, de compétitivité, de maîtrise des chaînes de valeur, et d'acceptabilité. Spécialisé dans l’étude des politiques européennes de l’énergie et du climat, et des marchés de l’énergie en Europe et dans le monde, ses travaux portent aussi sur les stratégies énergétiques et climatiques des grandes puissances comme les Etats-Unis, la Chine ou l’Inde. Il offre une expertise reconnue, enrichie de collaborations internationales et d'événements à Paris et à Bruxelles, notamment.

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