Mercosur : l'Europe peut-elle encore croire au libre-échange ?
Le rejet du Mercosur fait l’objet d’un consensus très inhabituel en France, en plein retour de la crise agricole. À l'échelle de l'Union européenne en revanche, ce traité commercial met en lumière de profondes divisions entre les États...
Le bras de fer entre les puissances européennes sur le Mercosur fragilise la cohésion des États de l'Union. A contrario, les différentes forces politiques françaises semblent, elles, unanimes pour refuser cet accord, si bien que l'on en vient à se demander pourquoi des négociations ont été entamées à son sujet. Quelles ont été les principales étapes du Mercosur ? Quel est le but d'un tel accord ?
Les avantages comparatifs du Mercosur
Comme le rappelle Sébastien Jean, le Mercosur est un accord de libre-échange entre l'Union Européenne et les États qui composent le Mercosur, à savoir le Brésil, l'Argentine, l'Uruguay, le Paraguay et la Bolivie. Cet accord vise à renforcer les échanges en éliminant les droits de douane, notamment sur les produits agricoles d'Amérique du Sud et sur les produits industriels européens. Le professeur d'économie va plus loin :
"La logique sous-jacente à cet accord est celle de l’avantage comparatif : chaque pays échange des produits dans lesquels il est plus performant. Les pays du Mercosur, puissance agricole et agro-exportatrice par excellence, exportent principalement des produits comme la viande (bœuf, volaille), tandis que l'Europe, dont la France, se concentrent sur les secteurs industriels et les services".
Mercosur : une "fatigue" et un "malaise" français
Cependant, l'accord présente des risques pour certains secteurs vulnérables. En France, les agriculteurs sont particulièrement inquiets des conséquences d'une telle ouverture.
Sébastien Jean voit dans la réaction française l'expression d'une fatigue et d'un malaise :
"une fatigue parce qu'on a l'impression qu'accord après accord, on est un peu toujours du mauvais côté de la barrière, c'est-à-dire que là où on est en situation défensive, on risque d'avoir plus d'importations. C'est donc souvent dans l'agriculture française qu'il y a un coût d'ajustement. Puis, il y a un malaise lié à la transformation de l'agriculture, le niveau d'ambitions dans les réglementations, les normes qu'on impose. Les agriculteurs ressentent un décalage, car ils sont mis en concurrence avec des gens à qui on ne demande pas des efforts comparables. D'où le débat autour des clauses miroirs".
Sébastien Jean Professeur d'économie au Conservatoire National des Arts et Métiers et directeur associé de l'initiative Géoéconomie-géofinance de l'Ifri (Institut français des relations internationales)
Elvire Fabry Chercheuse senior sur la géopolitique du commerce à l’Institut Jacques Delors
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