Élections en Allemagne : Olaf Scholz, un vainqueur pragmatique en quête d’alliés
Encore distancé dans les sondages au début de l’été, le candidat social-démocrate Olaf Scholz est finalement arrivé en tête des élections législatives allemandes, ce dimanche 26 septembre, devançant la CDU. Il va maintenant devoir bâtir une coalition. La construction d’un accord de gouvernement, probablement avec les écologistes et les libéraux, devrait prendre encore plusieurs semaines.
Vice-chancelier et ministre des Finances du gouvernement sortant, Olaf Scholz est parvenu dans sa campagne à réaliser une synthèse habile entre un certain besoin de continuité et de sécurité d’une grande partie des électeurs allemands, et une soif de changement qu’il a su incarner en promettant de construire une alliance avec les Verts, marquant donc une rupture avec la «grande coalition» qui rassemblait la CDU et la SPD depuis l’accord laborieusement élaboré après le précédent scrutin de 2017. En rassemblant plus de 25% des voix, il a obtenu un score honorable, qui devrait permettre aux sociaux-démocrates de prendre les commandes d’une nouvelle coalition.
Angela Merkel restera chancelière jusqu’à l’investiture d’un nouveau gouvernement, potentiellement en décembre, et devrait donc battre le record de longévité au pouvoir de son ancien mentor Helmut Kohl. Sa longue expérience gouvernementale s’achève sur une défaite de la CDU-CSU, qui réalise un score historiquement bas, avec 24% des voix. Mais plus qu’un désaveu de la chancelière sortante, qui reste populaire, ce mauvais score marque plutôt l’échec personnel du candidat chrétien-démocrate Armin Laschet.
Un après-Merkel incertain pour les chrétiens-démocrates
La campagne d’Armin Laschet s’est enlisée à partir de l’été, et sa crédibilité a été affectée par son attitude jugée désinvolte lors des inondations de juillet dernier dans le Land de Rhénanie du Nord-Westphalie, qu’il préside. Néanmoins, compte tenu de la complexité du système institutionnel allemand, la CDU pourrait tout de même être appelée à prendre la tête d’une coalition en cas d’échec des négociations entre les sociaux-démocrates, les écologistes et les libéraux.
Après les premiers résultats, dimanche soir, Armin Laschet a reconnu que sa famille politique avait «besoin de changement» mais il s’est tout de même dit prêt à gouverner, si le contexte nécessite une alliance alternative. Ce scénario semble improbable mais il n'est pas impossible dans la culture politique allemande, car des coalitions entre la droite et les écologistes ont pu se construire dans certains Länder.
La percée des écologistes
La troisième force politique du pays n’est plus l’extrême-droite, mais les Verts. Donnés un temps au coude-à-coude dans les sondages avec le SPD et la CDU dans les sondages, les écologistes ont perdu du terrain en fin de campagne, probablement en raison du manque de charisme de leur candidate, Annalena Baerbock. Néanmoins, en frôlant la barre des 15%, les écologistes obtiennent 110 députés (contre 67 dans la législature précédente) et se trouvent en position de "faiseurs de roi". L’accord de coalition à venir marquera donc certainement une forte inflexion en faveur de la lutte contre le réchauffement climatique et la transition énergétique.
Les libéraux-démocrates ont également obtenu un bon score, avec 11,5% des voix et 92 élus. Leur leader, Christian Lindner, qui réclame le ministère des Finances, est un tenant d’une stricte orthodoxie budgétaire. La négociation d’un accord de gouvernement s’annonce donc très complexe avec les écologistes, qui appellent au contraire à des investissements publics massifs pour accompagner la transition énergétique.
La marginalisation des partis contestataires
En dehors du périmètre des partis de gouvernement, l’AFD qui avait fait une entrée fracassante au Bundestag en 2017, régresse légèrement avec 10,3% des voix, et 83 élus. Sa progression est enrayée sur le plan national, mais ce parti d’extrême-droite confirme son ancrage dans certains Länder de l’Est, notamment dans la Saxe où il est arrivé en tête. Enfin, Die Linke, parti regroupant la gauche alternative et les nostalgiques de l’ex-RDA, n’obtient que 39 députés, avec 4,9% des voix: la gauche radicale a perdu près de la moitié de ses électeurs et de ses élus.
Paul Maurice, chercheur au Comité d’études des relations franco-allemandes de l’IFRI (Institut Français des Relations Internationales) nous livre son regard sur les résultats de ce scrutin.
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