Au XIXᵉ siècle, quand le temps du voyage était celui de la formation et non de la distraction, les jeunes gens bien nés et bien dotés étaient encouragés à parcourir l’Europe et à séjourner dans les quelques villes qui, à leur époque, résumaient le monde. Où donc iraient-ils aujourd’hui ? Où vont-ils pour comprendre, jusque dans ses excès et ses impasses, notre époque contemporaine ? Dubaï est la ville-monde de ce premier quart de siècle, la plaque tournante de la finance, du commerce, du tourisme et de la criminalité mondialisés.

Dubaï entre flux, circulation, mouvement et croisements d’intérêts

En 1979, l'historien Fernand Braudel définissait la ville-monde comme l’endroit où « les informations, les marchandises, les capitaux, les crédits, les hommes, les ordres, les lettres marchandes affluent et repartent ». Il n’est pas question d’autres formes de création hors la technologie, mais bien de flux, de circulation, de mouvement, de croisements d’intérêts. C’est aujourd’hui le rôle que revendique l’émirat de Dubaï – mirage mondialisé né sur les rives insalubres du Golfe Persique à l’époque où on y pêchait les huîtres pour leurs perles, devenu en moins de 30 ans cette ville minérale de 3 millions et demi d’habitants où l'on voit tant d’expatriés, si peu de Bédouins autochtones et encore moins de vieillards. Cette cité-État ouverte à l’immédiat, refuge de tous ceux qui sont assez riches pour échapper aux guerres, aux sanctions, aux impôts et même à la justice. Un lieu dirigé de main de fer par la même famille depuis plusieurs générations, abondamment pourvues, il est vrai, par la polygamie. Le régime allie de fait un mélange singulier de liberté et d’obsession sécuritaire tout en déléguant à l’émirat voisin d’Abu Dhabi sa défense et sa politique étrangère. Partons donc à la découverte de Dubaï, de sa complexité, de ses contradictions, de son évolution en fonction des contraintes climatiques et environnementales.

Avec :

Carlos Moreno, professeur des Universités, chercheur, auteur, expert international villes, territoires de demain
Sébastien Jean, professeur d'économie au Conservatoire National des Arts et Métiers et directeur associé de l'initiative Géoéconomie-géofinance de l'Ifri (Institut français des relations internationales)
Camille Ammoun, écrivain et politologue, chercheur associé en environnement urbain et économie du changement climatique à l’Université Américaine de Beyrouth

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