L’Allemagne face aux bouleversements géopolitiques mondiaux. Des réponses insuffisantes
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Les images horribles du massacre perpétré contre les Israéliens le 7 octobre 2023, les souffrances de la population palestinienne de Gaza, détruite et sans doute désormais inhabitable, ainsi que la terreur russe qui s’exerce sur la population civile ukrainienne depuis bientôt trois ans confrontent l’Allemagne à une vérité géopolitique qui est à l’opposé d’un monde idéal où des pays, transformés en acteurs post-nationaux, animés par le bien commun de l’humanité et le progrès social, se soumettent volontairement aux postulats des normes du droit international et le respectent.
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Le monde du XXIe siècle s’inscrit davantage dans une logique hobbesienne (« l’état de nature est un état de la guerre de tous contre tous » – Bellum omnium contra omnes) que dans la recherche de Kant d’une « paix perpétuelle », qui serait à même de constitutionnaliser les rapports entre les hommes et de les réguler par des médiations juridiques capables de remédier à leur « insociable sociabilité ». Le glissement spectaculaire du système des relations internationales issu de la Seconde Guerre mondiale, basé sur les règles des théories idéalistes (Kant), vers un système anarchique (Hobbes) qui part du principe selon lequel les conflits militaires sont inévitables dans les relations internationales, renforce la plupart des Allemands dans leur horreur de la guerre et de la violence. Et notamment ceux qui, dans leur enfance, ont connu les bombardements alliés et qui ont vécu en paix pendant près de 80 ans sont aujourd’hui déboussolés face au retour de la guerre comme élément structurant du système international…
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Hans Stark est professeur à Sorbonne Université et conseiller pour les relations franco-allemandes (Cerfa) à l'Ifri.
Article paru dans Allemagne d'aujourd'hui, n° 250, octobre-décembre 2024, p. 32-42, intitulé « La fin de la coalition "feu tricolore" – vers des élections anticipées le 23 février 2025. Les évolutions du paysage politique en Allemagne », sous la direction de Étienne Dubslaff, Paul Maurice, Hans Stark et Jérôme Vaillant.
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