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Die Europäische Sicherheits- und Verteidigungspolitik. Positionnen, Perzeptionnen, Problems, Perspektiven

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Depuis le sommet franco-britannique de Saint-Malo (1998), les pays membres de l’Union européenne se sont engagés dans la voie d’une politique commune en matière de sécurité et de défense (PESD) et des progrès ont été enregistrés aussi bien au plan de la création d’institutions que de la mise sur pied d’une force d’intervention rapide pour l’accomplissement de missions de paix, selon le modèle défini à Petersberg (1992). Dès l’origine, toutefois, ce projet a suscité des réserves non seulement au sein de l’Union, mais aussi de la part des Etats-Unis qui redoutaient que l’émergence d’une entité européenne dotée de tous les attributs de la souveraineté militaire n’affaiblisse l’alliance atlantique. Ces craintes n’étaient guère fondées dans la mesure où les Européens ne contestaient pas la responsabilité principale de l’OTAN pour l’organisation de la défense collective et envisageaient surtout la conduite d’opérations de gestion des crises et de maintien de la paix dans les hypothèses où les Etats-Unis refuseraient de s’impliquer militairement. Il n’en reste pas moins que les malentendus transatlantiques font peser une lourde hypothèque sur la PESD et que, de l’aveu même des porte-parole de l’Union, les budgets militaires de la plupart des Etats membres ne sont pas à la hauteur des ambitions affichées.

C’est dans ce contexte qu’il faut saluer la parution de l’ouvrage collectif, publié sous la direction de Hans-Georg Ehrhart, et consacré à un examen systématique de la PESD du point de vue des principaux acteurs, sans négliger celui des pays européens non-membres et des puissances extérieures qui se sentent directement (Turquie, Etats-Unis, Canada) ou indirectement (Japon, Inde, Russie) concernées. Ce livre procède d’une recherche d’envergure réalisée pour l’essentiel dans le cadre de l’Institut pour la recherche sur la paix et la politique de sécurité près de l’Université de Hambourg (IFSH), et menée à son terme à l’Institut d’études de sécurité de l’UEO. L’inspirateur et le maître d’œuvre de ce projet est un analyste réputé des politiques de sécurité, et, pour élucider les problèmes soulevés par la construction de l’Europe de la défense, il s’est assuré le concours d’experts qualifiés originaires d’Europe, d’Amérique et d’Asie. Il en résulte que près de la moitié des contributions ont été rédigées dans la lingua franca des spécialistes, l’anglais. Mais, par delà la diversité des approches et la rigueur de l’entreprise, il convient de signaler que ce travail reflète dans une très large mesure des préoccupations allemandes, comme l’atteste la préface du docteur Eckhard Lübkemeier, directeur du département pour la PESD de l’Auswärtiges Amt, qui donne à ce projet une caution quasiment officielle.

Il ne saurait être question de résumer la teneur des études réunies dans ce volume, et l’on se bornera à en dégager l’esprit en mettant l’accent sur les problèmes soulevés par les dissonances euro-américaines et l’insuffisance de l’effort de défense des Européens. Ainsi, il est entendu que la finalité de la PESD n’est pas la défense collective, qui incombe exclusivement à l’OTAN, mais la gestion des crises et le maintien de la paix dans le cadre d’une division des tâches au sein de l’Alliance atlantique. Pour relever ce défi, les Européens ont pris l’engagement de se doter de capacités civiles et militaires leur permettant d’agir d’une manière autonome, tout en revendiquant la possibilité d’utiliser les moyens de l’OTAN dans les domaines où leurs carences sont manifestes comme le transport à longue distance, l’observation spatiale et la gestion informatisée du champ de bataille. Or, des difficultés ont surgi en ce qui concerne la conclusion d’arrangements autorisant l’accès de l’Union à des moyens de l’OTAN identifiés au préalable, et la querelle entre la Grèce et la Turquie à ce sujet ne laisse pas bien augurer d’une résolution satisfaisante du problème. Par ailleurs, l’objectif global (headline goal) que les Etats membres de l’Union se sont fixé à Helsinki (1999) a peu de chances d’être atteint en raison de l’insuffisance de leur effort de défense. En l’absence d’une volonté ferme pour redresser la barre, la PESD risque donc de n’être, selon la formule mallarméenne d’un ambassadeur de France, qu’un 'bibelot d’inanité sonore'.

Sur les ambiguïtés et les incertitudes de cette politique, les constats sont convergents, mais les conclusions qu’en tirent les auteurs sont diverses. Les uns plaident fortement pour le développement d’une PESD qui permettrait à l’Union de s’affirmer comme communauté capable de gérer toutes les crises la concernant directement et de laisser à l’OTAN le soin d’assurer sa défense et de gérer les crises de grande intensité. D’autres ne voient dans la PESD qu’un ferment de discorde entre alliés et penchent pour une meilleure répartition des tâches au sein d’une Alliance rénovée. D’autres enfin, prêtent une attention particulière à la politique des Etats qui se réclament d’une tradition de neutralité et privilégient la participation à des opérations de paix placées sous l’égide des organisations internationales comme l’ONU et l’OSCE.

H.-G. Ehrhart, pour sa part, se prononce sans réserve en faveur d’une PESD dotée de moyens d’action efficaces, et fait des recommandations pertinentes à cet effet, notamment en prônant une gestion plus rationnelle des dépenses militaires et une adaptation des forces armées allemandes à leurs nouvelles missions. Toutefois, il ne se dissimule pas les difficultés de l’entreprise, et, passant en revue les contributions à l’ouvrage dont il est le maître d’œuvre, il prend acte de l’absence d’un véritable consensus entre les trois grands –Allemagne, France et Royaume-Uni– à la fois sur la finalité d’une PESD et sur son articulation avec une Politique étrangère et de sécurité commune (PESC) encore dans les limbes. Il relève également la méfiance et les réticences des petites puissances, qui ne souhaitent pas voir s’établir un directoire européen et privilégient la garantie offerte par les Etats-Unis dans le cadre de l’Alliance. Enfin, l’Europe de la défense est perçue selon des optiques différentes par les puissances extérieures et ne sera pas en mesure, dans la plupart des cas, de répondre aux attentes de ceux qui voudraient lui voir jouer un rôle plus actif sur d’autres continents ou dans la restructuration du système de sécurité mondial. Si M. Ehrhart persévère néanmoins dans son dessein, c’est qu’il est convaincu que la PESD répond aux aspirations des Européens et que l’objectif que s’est assigné l’Union après la guerre du Kosovo n’est pas hors de portée si elle se donne les moyens de l’atteindre.

Cet ouvrage est un guide indispensable pour quiconque s’interroge sur les chances et la signification d’une politique européenne de sécurité et de défense. Les eurosceptiques y trouveront de nombreux éléments pour étayer leurs thèses, mais les tenants d’une 'Europe puissance' pourront également s’en prévaloir dans la mesure où le propos de H.-G. Ehrhart est d’élaborer un modèle qui permettrait à l’Union de s’affirmer comme une 'puissance de paix coopérative' (Kooperative Friedensmacht). Selon lui, l’accent serait mis sur la gestion civile des crises, le développement d’une culture stratégique moins tributaire des Etats-Unis et la coopération avec les organisations internationales pour promouvoir la paix et la sécurité internationales. Cette visée paraîtra sans doute trop modeste à ceux qui rêvent d’une Europe acteur stratégique à part entière, mais on ne saurait l’ignorer si on veut mettre la PESD à l’épreuve au lieu de se complaire dans une rhétorique flamboyante qui n’abuse personne.

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