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Le vol de pétrole prend des proportions dantesques au Nigeria

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interviewé par Olivier Rogez pour

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Quatre cent mille barils ! C'est le montant estimé du pétrole volé chaque jour au Nigeria. Un chiffre incroyablement élevé, calculé sur une moyenne de dix ans par une ONG nigériane, la Nigeria Natural Resource Charter (NNRC).
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A titre de comparaison le Gabon produit deux cent trente mille barils par jour. Comment expliquer un tel détournement ?

Dans le delta du Niger, le trafic de pétrole est un fléau tout autant qu'une industrie. La géographie s'y prête particulièrement bien, explique le directeur du cabinet de consultant Géopolia.

Ce sont des petits gisements de production, très nombreux, avec de petits tuyaux qui vont rejoindre les pipe-lines plus gros, jusqu'à atteindre les grands pipe-lines stratégiques est-ouest. Et donc, à différents niveaux, il est possible pour les populations de siphonner le pétrole en circulation dans ces tuyaux. Dans les gros pipes d'exportation, la pression est contrôlée, et lorsqu'il y a un siphonnage les opérateurs peuvent constater la baisse de pression et réagir, mais c'est un mécanisme qui n'existe pas sur les petits tuyaux.

Cette industrie clandestine est bien équipée, avec des mini-tanker qui attendent les trafiquants au large. Pourtant, les contrebandiers nigérians n'expliquent pas à eux seuls l'énormité de ces détournements, quatre cent mille barils par jour, dont la première victime est la NNPC, la compagnie pétrolière nigériane. Explication de Benjamin Augé, chercheur à l'IFRI.

« C'est en fait toute une chaîne de commandement, militaire, pétrolière, qui est corrompue et qui permet à des bateaux entiers de partir depuis les ports officiels, jusqu'au large, où là les cargaisons sont blanchies, par exemple dans les raffineries des pays de la région. Evidemment que la NNPC est mêlée (a ces trafics NDLR), mais c'est au niveau des individus et non au niveau de la NNPC en tant qu'institution d'état. Mais le gros du problème c'est plutôt la Sécurité, la Défense et les Douanes. Donc, l'armée dans sa globalité dans cette région du delta du Niger. »

Depuis des décennies, les présidents successifs promettent de s'attaquer à ce trafic. Mais selon Benjamin Augé, les intérêts en jeu sont si énormes que les pouvoirs fédéraux et centraux sont paralysés.

« L'argent qui est généré par ce trafic peut atteindre des sommes allant jusqu'à dix milliards de dollars par an. Donc, il est absolument impossible de tuer ce réseau qui en fait, innerve complètement la politique du Delta et la politique à Abuja. L'argent finance des campagnes, fait élire des gouverneurs dans la région du Delta et permet à des hommes d'affaires, y compris du nord, de s'enrichir considérablement. Donc c'est vraiment tout un réseau vérolé qui, comme il investit beaucoup dans la politique, permet de s'auto-entretenir, et ce quelle que soit la personne au pouvoir à Abuja. »

Ce trafic fait perdre chaque année dix milliards de dollars au pays, soit un tiers du budget fédéral.

Ecouter l'émission sur le site de RFI

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Benjamin AUGÉ

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