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Rendre sa force à l'Europe. Un appel franco-germano-polonais

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Le Groupe de réflexion franco-allemand et le Groupe Copernic germano-polonais se sont réunis au Château de Genshagen près de Berlin lors d’une séance commune à l’occasion du 25e anniversaire de la création du Triangle de Weimar. La présente note propose une synthèse des réflexions des participants rassemblés autour du thème « Après le Brexit : perspectives de l’avenir de l’Europe à l’occasion du 25e anniversaire du Triangle de Weimar ».

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Au regard de l’onde de choc provoquée par le Brexit puis le résultat des élections américaines et de la menace d’un recul de l’intégration européenne, nous – Européens d’Allemagne, de France et de Pologne – mettons en exergue la valeur d’une coopération étroite entre ces trois pays au cœur de l’Europe et appelons à la vigilance face au danger de démantèlement du projet européen. Plus de 60 ans après le traité de Rome et un quart de siècle après les révolutions libertaires en Europe centrale et orientale, nous appelons à garantir les acquis et à poursuivre courageusement l’intégration. La coopération au sein du Triangle de Weimar (Allemagne, France, Pologne) reste en ce sens un instrument précieux. Tandis que ce dernier avait fait montre de sa compétence dans la politique orientale de l’Union européenne (UE) à l’occasion de la révolution de Maïdan de 2014, il est maintenant sollicité au cœur de l’Union.

Nous dénonçons avec force le tableau critique partial souvent dressé de l’UE dans les débats publics et politiques tout en rappelant qu’au cours de son histoire, l’intégration européenne a tenu dans une large mesure ses promesses qui étaient à la base de son projet de civilisation : la paix entre ses membres après des siècles de guerre, la croissance de la prospérité grâce au marché intérieur et à ses quatre libertés fondamentales, l’essor des principes de libéralité, d’humanité et de solidarité. Ces réalisations sont menacées par les tendances récentes de retour du nationalisme économique, les succès dans les urnes des partis populistes d’extrême droite, la crise économique et le chômage de masse dans le sud de l’Europe, ainsi que par l’impuissance de l’UE dans les conflits impliquant son voisinage immédiat. Pourtant, malgré le Brexit, le projet européen continue de rassembler la grande majorité des Européens (y compris les candidats à l’adhésion).

L’Europe se réconforte en constatant que, l’une après l’autre, les crises ont toujours fait avancer l’UE. Cette fois, c’est différent. La crise actuelle, qui se manifestait déjà dans les critiques du traité de Maastricht et qui a réellement éclaté avec les référendums français et néerlandais sur la Constitution, a profondément ébranlé les fondements de l’intégration européenne. L’absence de majorité au sein des élites politiques et de soutien de la population empêche toute avancée significative dans le sens du transfert de nouvelles compétences aux institutions européennes. De la même manière, aucun consensus ne se dégage entre les États membres de l’UE en vue de poursuivre le travail conjointement sur certains projets européens d’envergure dans les domaines politique et économique.

Nous appelons donc les représentants de nos trois pays à renforcer la cohésion de l’UE, en particulier sur les aspects détaillés ci-après, en soutenant les initiatives communes et ainsi, à garder la porte ouverte aux nouvelles avancées nécessaires en matière d’intégration politique.

  • Une priorité absolue doit être accordée au développement volontaire d’une politique étrangère, de sécurité et de défense commune, compte tenu des guerres ou des risques pour la sécurité à l’est et au sud de l’UE, avec en toile de fond la rupture du statu quo territorial en Europe par la Russie, mais aussi avec la menace que représente le terrorisme islamiste dans nos pays. Cet aspect est d’autant plus important dans le contexte de l’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis qui augure, selon toute vraisemblance, un renforcement de la politique isolationniste outre-Atlantique et une orientation stratégique axée vers l’espace pacifique et prenant ses distances avec l’Europe.
  • La protection des frontières extérieures de l’UE, une politique d’asile commune vraiment convaincante, ainsi que le développement d’une politique européenne d’immigration ne peuvent être traités séparément. La première doit être gérée au niveau communautaire, le prolongement du mandat de Frontex revêtant en ce sens un caractère positif. La protection renforcée des frontières extérieures ne peut cependant pas être exercée en enfreignant le droit d’asile et les principes de la Convention de Genève relative au statut des réfugiés. Il est donc impossible de faire l’impasse sur l’ajout d’une politique d’immigration commune tournée vers l’avenir.
  • La consolidation de la zone euro reste indispensable. Sans l’Union monétaire, les turbulences qu’ont connues les devises dans les années 1980 feraient assurément leur retour, sonnant le glas du marché européen. Cette consolidation constitue également une condition préalable pour que la Pologne remplisse ses obligations contractuelles à moyen terme en vue de l’adhésion à l’Union monétaire.
  • Il faut absolument accorder plus d’attention à la protection de la paix et de la cohésion sociales. Bien que la mise en place des systèmes sociaux ne figure pas au nombre des compétences communautaires, l’UE doit en faire plus pour lutter contre le chômage de masse dans le sud du continent et contre l’inflation des idées populistes afin de relancer l’ascenseur social pour des pans entiers de la population et offrir des perspectives à la jeune génération. Il est fondamental de prendre très au sérieux le risque de fracture sociale.
  • À cet effet, l’idée de l’intégration et de la solidarité européennes doit être bien plus tangible sur le plan régional et local afin d’être perçue de façon positive. Il s’agit là de la première cause expliquant la résistance observée au sein des États membres de l’UE contre « le système » et contre l’UE, considérée comme un « projet des élites ». Pour ce faire, un soutien franc et massif aux projets bi- et multilatéraux est nécessaire sur les plans économique, social et culturel aux niveaux régional et local (démarche ascendante).

Nous sommes convaincus d’une chose : l’intégration européenne a besoin de reconstruire l’idée de responsabilité commune et de leadership politique grâce à l’action conjointe et enthousiaste des États membres et d’une Commission européenne forte favorable à une conception politique unique et non négociable de la paix, de la liberté et de la solidarité.

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Rendre sa force à l'Europe. Un appel franco-germano-polonais

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Comité d'études des relations franco-allemandes (Cerfa)
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Le Comité d'études des relations franco-allemandes (Cerfa) a été créé en 1954 par un accord intergouvernemental entre la République fédérale d’Allemagne et la France, afin de mieux faire connaître l'Allemagne en France et analyser les relations franco-allemandes y compris dans leurs dimensions européennes et internationales. Dans ses conférences et séminaires, qui réunissent experts, responsables politiques, hauts décideurs et représentants de la société civile des deux pays, le Cerfa développe le débat franco-allemand et suscite les propositions politiques. Il publie régulièrement des études à travers deux collections : les « Notes du Cerfa » et les « Visions franco-allemandes ». 

Le Cerfa entretient des relations étroites avec le réseau des fondations et des think tanks allemands. En plus de ses activités de recherche et de débat, le Cerfa promeut l’émergence d’une nouvelle génération franco-allemande à travers des programmes de coopération originaux. C'est ainsi qu'en 2021-2022, le Cerfa a conduit un programme sur le multilatéralisme avec la Fondation Konrad Adenauer de Paris. Ce programme s'adresse à des jeunes professionnels des deux pays intéressés par les enjeux du multilatéralisme dans le contexte de leurs activités. Il a couvert une large gamme de thèmes relatifs au multilatéralisme, tel que le commerce international, la santé, les droits de l’homme et la migration, la non-prolifération et le désarmement. Auparavant, le Cerfa avait participé au dialogue d’avenir franco-allemand, co-piloté de 2007 à 2020 avec la Deutsche Gesellschaft für auswärtige Politik (DGAP) et soutenu par la Fondation Robert Bosch, ou encore le groupe Daniel Vernet (anciennement Groupe de réflexion franco-allemand) qui avait été fondé en 2014 à l’initiative de la Fondation Genshagen.

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