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Nucléaire : l’Iran entre coopération et défi

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Ces derniers mois, l'Iran a augmenté son stock d'uranium enrichi sur son territoire. Théoriquement, selon un accord signé en 2015 entre l'Iran et les membres du Conseil de sécurité des Nations Unis, le taux d'enrichissement de l'uranium iranien ne devrait pas dépasser 3,6 %. Or l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) révèle qu'il est aujourd'hui enrichi à prêt de 84 %, à un rien des 90 % nécessaires pour produire une bombe atomique. Depuis mai 2018 et la sortie des Etats-Unis des accords de 2015 décidée par Donald Trump, les négociations avec Téhéran patinent et les Iraniens sont de plus en plus exigeants sur les contreparties à une limitation de leur activité nucléaire.

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Centrale nucléaire de Boushehr, Iran
Centrale nucléaire de Boushehr, Iran
Maryam Rahmanian/UPI/Shutterstock
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En mars dernier, Rafael Grossi, le directeur de l'AIEA, était rentré très confiant d'une visite en Iran alors que les acteurs impliqués dans les négotiations avec Téhéran sur la question du nucléaire craignaient de leur côté une escalade suite à la découverte de particules sur des sites non déclarés. Est-ce que le rapport rendu public ces derniers jours par l'Agence traduit cette confiance et témoigne de la bonne volonté du régime iranien dans sa coopération avec les institutions ?

"Tout d'abord il faut préciser que les rapports de l'AIEA sur l'Iran sont publiés tous les trois mois, juste avant un conseil des gouverneurs qui est une instance de l'AIEA permettant de mettre en place des sanctions ou des limitations sur l'Iran. Généralement, on observe qu'avant chaque réunion du conseil des gouverneurs de l'AIEA et donc chaque publication d'un rapport, l'Iran fait en sorte de donner des petites concessions en l'échange tout de même d'une poursuite de son programme. C'est tout à fait ce qu'on observe aujourd'hui avec d'un côté un stock d'enrichissement record et de l'autre des avancées sur certains dossiers, par exemple on sait maintenant que les particules d'uranium enrichies à 83 % ne constituent pas du tout un stock et les explications données par l'Iran quant à cet enrichissement ont été jugées satisfaisantes par l'AIEA", répond Héloïse Fayet.

On a quand même l'impression qu'il y a un paradoxe avec le régime iranien qui poursuit son escalade nucléaire mais qui continue à coopérer. Est-ce que l'AIEA salue la transparence de Téhéran sur son non-respect des engagements ?

"L'AIE est un peu contrainte de le faire quand il y a vraiment des progrès sur certains dossiers, mais c'est certain que l'AIEA et la communauté internationale ne parviennent pas à empêcher l'Iran à continuer d'enrichir son uranium (23 fois le stock autorisé par le JCPoA aujourd'hui). Donc l'AIEA est obligée de saluer des petites avancées pour ensuite espérer en avoir des plus importantes à l'avenir", explique Héloïse Fayet.

Aujourd'hui, pour être précis, l'Iran dispose de 470 kilogrammes d'uranium enrichi à 20 % et de 114 kilogrammes d'uranium à 60 %. Est-ce que cela suffit pour fabriquer une bombe nucléaire ?

"L'idée, c'est d'accumuler assez de matière fissile - donc d'uranium enrichi à 90 % - pour fabriquer une charge nucléaire. À ce stade, avec autant d'uranium enrichi à 60 %, on estime que l'Iran pourrait fabriquer une charge nucléaire en une semaine. Sauf que, heureusement, ce n'est pas parce que vous accumulez cette matière fissile que vous pouvez l'envoyer sur la cible de votre choix. Il faut passer par plusieurs étapes, notamment la transformation de cet uranium en uranium métal, la fabrication d'autres éléments, le fait de mettre la charge sur un vecteur (donc typiquement un missile balistique dans le cas de l'Iran)... C'est un processus qui pourrait prendre, selon les estimations, entre 1 an et demi et 2 ans. Surtout, ce serait quelque chose qui serait détectable donc on peut imaginer que les États-Unis, voire Israël, prendraient des mesures pour éviter qu'on en arrive là", détaille Héloïse Fayet.

 

> Écouter le podcast de l'émission sur le site de France Culture

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Héloïse FAYET

Héloïse FAYET

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Chercheuse, responsable du programme dissuasion et prolifération, Centre des études de sécurité de l'Ifri

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Centrale nucléaire de Boushehr, Iran
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